Chapitre 23 M -
Z (Travaux divers) |
23 M
renaissance
traditionnelle |
désaguliers
– danchez – mollier |
R.T. |
1970 |
Revue maçonnique et métaphysique de très grande qualité. Elle fut fondée en 1970 par René DÉSAGULIERS. Complet de n° 1 (1970) à aujourd’hui. Pour voir la thématique des articles et auteurs parus depuis le n° 1. clique ICI ! |
LE RETOURNEMENT DU COMPAGNON |
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2015 |
La
cérémonie de l’Élévation commence par l'introduction du Compagnon, qui se présente
à la porte du Temple de dos par rapport à l'Orient. Les quelques pas qu'il
effectue alors en marche arrière, font
que cette déambulation spécifique et unique, soit appelée
couramment « marche à
reculons ». Pour
ne pas se laisser prendre au piège des mots ou à celui d'une interprétation à résonance négative,
il est préférable de parler du « Retournement du Compagnon ». Cette
phase de la cérémonie se décompose donc en deux temps, qui ont chacun leur
raison d'être et leur spécificité, mais qui sont indissociables : la
marche à reculons et le retournement. Pourquoi
se présenter de dos à la Loge ? La
marche à reculons n'est absolument pas une régression, bien au contraire.
Tourné vers l'extérieur du Temple, le Compagnon est appelé à passer à rebours
sur le chemin déjà parcouru, pour mieux le voir ,mieux l'assimiler, et en avoir un meilleur point
de vue sous un éclairage différent. Loin de signifier une rétrogradation, la
marche à reculons réveille la mémoire récapitulative et agissante du
candidat, lui rappelant l'enseignement acquis au fil des deux premiers
degrés, indispensable pour lui permettre d'aller au-delà : les
lumières du passé éclairent notre avenir. La
marche à reculons est également d'une certaine manière, une descente en soi,
vers son intériorité, pour faire un bilan des acquis : c'est la
contemplation de l’œuvre accomplie. Il s'agit donc, non pas d'un recul, mais
bien d'une prise de recul par rapport au passé, et aussi vis à vis de
soi-même. Cette
réflexion assimilable à un examen de conscience, est nécessaire pour effectuer un
retournement complet et opérer un changement d'état irréversible. On
peut également voir dans cette déambulation en marche arrière une façon de
préserver le candidat, en lui évitant une confrontation brutale et non
préparée à la mort. L’Étoile
Flamboyante En
pénétrant ainsi dans le Loge, le Compagnon va être plongé dans une atmosphère
de deuil, de désolation et de chaos total. Seule, une lumière brille, celle
de l'Etoile Flamboyante située à l'occident, au-dessus de la porte. Sa
brillance est voilée, elle n'est plus aussi lumineuse que lorsque le
compagnon « l'a vu » pour la première fois à l'Orient, lors de son
passage. Si la lumière qu'elle diffuse est plus faible, c'est qu'à ce stade,
le compagnon est sensé l'avoir traversé et intégré. D'ailleurs,
cette E.F située au-dessus de la porte, est-elle vraiment à l'occident. On
peut penser qu'elle n'y est que pour les besoins de la disposition de la
Loge, mais qu'en réalité, elle est en nous,
que nous sommes en elle, que nous l'avons totalement intégrée à
tout jamais. Sa brillance des premiers temps est physiquement réduite,
mais elle est toujours aussi lumineuse dans notre intériorité. Cette faible
lueur que contemple le compagnon doit l'interpeller sur l'assimilation
qu'il en a fait. Elle est désormais
son guide intérieur et il est nécessaire de lui donner le temps de la réflexion pour aller
du passé vers son futur. Il
est donc important, lors de la cérémonie, que la contemplation de cette E.F
se fasse dans un silence absolu, et soit suffisamment longue pour provoquer
une réaction psychologique du candidat
à l'élévation. En effet, le pic de la cérémonie, l’endroit où le choc
psychologique prend racine, ne réside-t-il pas justement dans temps
de contemplation de l’étoile, symbole paisible d’un itinéraire déjà pratiqué,
rendant plus percutante, dès le retournement effectué, l’inquiétante vision
du chaos de la Loge plongée dans les ténèbres ? Effet de chaud et froid
garanti, amené par la mise en scène théâtrale et dramatique du rituel qui
cherche à impressionner le Compagnon et dès lors, ne plus le préserver, bien
au contraire ! Vient
ensuite le temps du retournement proprement dit. Au-delà
de son aspect gestuel ou physique, ce Retournement est avant tout psychologique.
Ce n'est pas encore un changement d’état de conscience, mais il y prépare le
candidat. Il s'agit de tourner le dos à son ancienne condition pour faire
face à une nouvelle. Comme le fœtus se retourne dans le ventre de sa mère
pour se préparer à la naissance, le compagnon se retourne pour se préparer à
une Re-naissance. En tournant le dos au passé, il abandonne ses valeurs et
ses illusions pour aller vers davantage de Lumière, Lumière intérieure à
découvrir en soi. Il
se prépare à un événement majeur qui est celui de la mort (symbolique) suivi
d'une palingénésie. «
Meurs et deviens » (Goethe) Ce
retournement intérieur est indispensable à l'expression du Maître intérieur
qui va suivre lors du relèvement. C'est
d’ailleurs grâce à cette palingénésie que va s'opérer le retour à l'ordre. Le
Maître reparaît, plus radieux que jamais, et ce changement d'état de
conscience replace chaque chose à sa place, réunit ce qui est épars. Le
retournement intérieur prépare le candidat à l'élévation au passage des
« Petits Mystères » aux « Grands Mystères » des anciens
grecs. Pour le Franc-Maçon cherchant et en quête, il permet le passage de la
forme à l'essence. ADDENDUM Il est aussi intéressant de ne pas oublier dans cette
désolation, ce deuil, la lumière principielle sur la colonne Sagesse.
Elle est toujours là ! Le compagnon se retourne,
Hiram est mort mais cette Lumière (Divin, Esprit d’Hiram, A-venir de l’Etoile
flamboyante) est ici, en quelque sorte « en attente ». Après que
les neuf maitres aient tourné autour du cadavre d’Hiram, 9+1 (La Lumière), se
réalise alors l’élévation (ou
mieux l’assurection) du maître « plus radieux que jamais… » :
la palingénésie, le 10…. N’est-ce pas ça aussi ce Retournement annoncé en début de la cérémonie. |
mYTHES
ET MYTHOLOGIE |
Arcadia |
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2014 |
Il faut
distinguer mythe et mythologie. Le mythe entend exprimer, souvent sous forme
de récits, des vérités ou des réalités qui ne relèvent pas du savoir ordinaire.
Il nous ouvre à des mystères qui à la fois nous touchent, nous atteignent et
nous dépassent. Ainsi, les récits de la création, au début de la Genèse, sont
mythiques. Personne ne le conteste sérieusement. Cela n'enlève rien à leur
valeur. Il ne faut pas assimiler le mythique avec la fabulation ou la
tromperie. Il traduit des convictions existentielles et des expériences
spirituelles qu'on ne peut pas formuler autrement, parce qu'il s'agit d'autre
chose que de connaissances proprement dites. La mythologie
constitue une déviation et une perversion du mythe. Elle tente de faire du
mystère, exprimé par le mythe, un savoir. Elle le met sur le même plan que
les connaissances ordinaires. Elle le ramène à des faits empiriques, au lieu
d'y voir un langage pour transmettre un sens qui se situe sur un plan
différent. Ainsi, elle fait des premiers chapitres de la création un rapport
historique qui décrirait ce qui s'est passé autrefois, de la même manière que
l'on pourrait raconter ce qu'on a vécu durant la journée d'hier, ou qu'un
historien établirait la chronologie de la seconde guerre mondiale. Le mythe
préserve le mystère tout en le dévoilant. La mythologie le supprime en le
mettant au même niveau que les autres connaissances et expériences. Alors que
le mythe ouvre l'intelligence à ce qui le dépasse sans pour cela la
supprimer, la mythologie conduit à des croyances aveugles et absurdes, et
exige de l'intelligence qu'elle s'y soumette. Deux tentations menacent
toujours la religion : la superstition et l'obscurantisme. Le mythe, bien
compris, permet de leur échapper; la mythologie, au contraire, tombe dans ces
deux erreurs et déviations. >> |
LA MḖLANCOLIE |
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Solange Sudarskis |
2014 |
La mélancolie est comme une nature
infinie qui vous submerge jusqu’à la félicité. Lorsque le soir tombe, je suis souvent prise de
mélancolie, un bonheur d’être triste comme dirait Victor Hugo, devant la
beauté du monde ; moi qui voudrais mourir en regardant la mer. Est-ce une
passion triste? Est-ce l’attente d’une compréhension du sens de la vie qui me
procurerait la sérénité de notre finitude ? J’ai trouvé dans une gravure
d’Albrecht Dürer l’expression vertigineuse de ces mêmes questionnements, une
illustration qui ré enchante mes souvenirs imagés de contes de fée. Cette
disposition d'âme a occupé l'Occident en touchant au cœur des problèmes
auxquels l'homme est aujourd'hui sensible en passant de l'histoire à la
philosophie, de la médecine à la psychiatrie, de la religion à la théologie,
de la littérature à l'art. L'iconographie de la mélancolie est d'une infinie
richesse et il n'est donc pas étonnant que ce soit l'histoire de l'art qui
ait su la première fournir les bases de cette nouvelle approche de l'histoire
culturelle du malaise saturnien. La mélancolie a fait, tout
d’abord, l'objet, sous son appellation de " dépression ", d'une
approche médico-scientifique. Les médecins de l’antiquité n’y voyaient en
général qu’une maladie. Ils considéraient la mélancolie comme l’une des
quatre humeurs (sanguine, cholérique, mélancolique, lymphatique),
tempéraments qui affectent tous les êtres humains. Mais si une d’entre elles
domine trop, elle peut conduire au vice et même à la folie. Du grec pathos,
puis du latin patior, souffrir, pâtir, les passions tristes sont des
états affectifs qui sont excités dans l’âme sans le secours de la volonté
(Descartes). Les passions se distribuent en sentiments positifs (affection,
amour...) et négatifs (haine, envie ressentiment…). Passions tristes, cette
expression est employée par Spinoza dans L’Éthique. Les passions
tristes, par opposition aux passions joyeuses, diminuent le pouvoir d’agir.
Ce sont toutes les passions associées à l’idée de quelque chose qui va à
l’encontre du conatus, c’est-à-dire de l’effort physique, intellectuel
ou moral, telle la haine, la crainte, l’envie, la colère, la honte, la pitié.
Par nature mauvaises, elles diminuent la puissance d’agir et tendent à rendre
les hommes ombrageux et inconséquents. Nous éprouvons de la tristesse lorsque
nous rencontrons un corps qui ne convient pas avec le nôtre, tout se passe
comme si la puissance de ce corps s'opposait au nôtre. Notre puissance d'agir
c'est-à-dire notre conatus en est empêché. Nous éprouvons alors de la
tristesse. Cette « torpeur de l’esprit qui ne
peut entreprendre le bien » n’était pas une simple paresse au sens de
fainéantise, elle était considérée par les chrétiens comme un grave péché.
Les passions tristes sont reprises par le christianisme sous la forme des 7
péchés capitaux identifiés par Thomas d'Aquin comme : l’acédie (l’ennui) ou
paresse spirituelle, l’orgueil, la gourmandise, la luxure, l’avarice, la
colère et l’envie). De l’ennui existentiel, Baudelaire poétisant le spleen,
écrit : Dans la ménagerie infâme de nos vices, Il en est un plus laid,
plus méchant, plus immonde ! Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands
cris, Il ferait volontiers de la terre un débris Et dans un bâillement
avalerait le monde ; C'est l'Ennui ! Nietzsche trouve un remède à la
mélancolie en assignant à la musique, non pas la gaieté à tout prix, mais la
perfection, l’achèvement des états du corps et du désir, surtout des affects,
sentiments et passions, y compris par le jeu cathartique et reposant (ou
apaisant) de la mélancolie. Les passions doivent ainsi se « spiritualiser »
ou se « sublimer » par les rythmes, les mélodies et les harmonies de la
musique. C’est ainsi que le corps et l’âme deviennent légers, « de belle
humeur », autrement dit, la musique est non point un narcotique, un opium du
peuple, mais le moyen du dépassement de soi, de l’accomplissement physique et
moral sans négation de soi et sans négation de la vie ni du corps. Cette paix
de l’accomplissement, Nietzsche l’appelle parfois aussi le bonheur. De même,
Rousseau fait-il dire à l’un de ses personnages, à propos d’un autre : La
musique remplira les vides du silence, le laissera rêver, et changera par
degrés sa douleur en mélancolie. Cependant, la mélancolie, par
tradition cause de souffrance et de folie, est aussi considérée depuis
l'Antiquité comme le tempérament des hommes marqués par la grandeur ; sa
désignation comme " maladie sacrée " induit cette dualité. Marsile
Ficin, humaniste de la Renaissance, décrivit la mélancolie comme faisant
alterner, voire coexister, des états de détresse et d'ardeur enthousiaste qui
métamorphosent l'individu en être supérieur inspiré, divin et sinistre à ses
heures, à la fois angélique et démoniaque. La mélancolie, pour moi, n’est pas
une pathologie, mais un sentiment à la fois intense et ambigu. Elle est une
plénitude équivoque : il semble que coexistent, en elle, la tristesse et la
joie. Un tel ressenti conduit à une tentative de saisir ce qui a lieu dans
cette intensité et à expliquer pourquoi c’est à la fois saisissant et
insaisissable comme une expérience initiatique. Ma mélancolie serait plutôt
celle du romantisme, elle est douce mélancolie, vague mélancolie, ineffable
mélancolie ; elle ne peut être dite qu’en disant : elle est un je-ne-sais-quoi. Durer a transcrit ce «
je-ne-sais-quoi» dans sa célèbre gravure sur cuivre. La scène se situe sur un
lieu en hauteur, offrant une vue… sur la mer et une côte urbanisée. Un
personnage ailé occupe une moitié diagonale de l’espace, captant le regard
par l’importance spatiale de sa représentation ; la robe, dont il est vêtu,
et son visage évoquent une femme, sa silhouette massive le rende étrangement
masculin, ni homme, ni femme, forcément, parce que c’est un ange. Assis
devant un bâtiment sans fenêtre, le coude gauche appuyé sur son genou, l’ange
tient sa tête dans une pose triste ou pensive. Dans sa main droite il tient
un compas, l’avant-bras prenant appui sur une tablette, l’esprit ailleurs, le
regard perdu dans le lointain. Le regard sérieux, la créature a dû écrire
quelque chose sur cette tablette avec la pointe du compas, maintenant le
regard est pensif, peut-être même triste. A l’arrière-plan, le rivage au
soleil couchant est couronné d’un arc-en-ciel blanc et sur un phylactère,
présenté dans le ciel par une créature ailée, genre chauve-souris ou dragon
volant, on peut lire : Melencolia § I Aux pieds de l’ange un chien, un
lévrier, est allongé, semblant s’ennuyer. A côté, traversant la gravure en
diagonale, comme pour séparer le premier plan du second, une échelle repose
contre le mur de la bâtisse. Et voici un second personnage, un angelot, un
putto, assis sur une roue de meunier recouverte d’un tapis qui s’appuie à
cette échelle et, par opposition à la rêverie de l’ange, lui, il est
concentré car il est en train d’écrire. Fait-il des devoirs donnés par l’ange
? Écrit-il parce que plus inspiré, plus savant que l’ange qui s’est arrêté
dans la perplexité, faute de savoir poursuivre ? L’ange lui a-t-il confié
quelque chose qu’il serait en train d’enregistrer ? Parce qu’enfantin, le
putto est-il disciple de l’ange adulte ? Et surtout, des objets posés au sol
ou accrochés au bâtiment proposent un décor énigmatique. Aux pieds des
personnages, oh les beaux outils ! : un soufflet, des clous, une scie, un
rabot, un marteau, une règle, une sphère, des pots en étain, une tenaille
dépassant à peine de dessous des plis de la robe de l’ange, tous objets de
bois et métal. Derrière l’ange, un énorme bloc,
peut-être de marbre, d’une pierre taillée à 8 faces irrégulières, dont 4
visibles, empêche l’accès à l’échelle en étant levé contre elle. Si on tente
de construire physiquement ce polyèdre, on a l’impression qu’il s’agit d’un
volume « impossible », qui n’existe qu’à la limite d’un rhomboèdre
partiellement tronqué avec un art consommé de stéréotomie. L’importance de ce
volume vient de ce qu’on ne peut dire, de prime abord, si la direction du
regard interrogatif et pensif du personnage central est orientée vers le
phylactère ou vers cette énorme pierre. L’ange n’est pas dans un état de
somnolence mais bien plutôt en état de super-éveil. Son visage sombre et son
regard fixe expriment une interrogation intense. Il a suspendu son travail,
non par indolence, mais parce qu’il est devenu en attente de sens. Comme le
formule Panofsky : « Ce n’est pas le sommeil qui paralyse son énergie,
c’est la pensée ». Dans sa Septième lettre,
Marsile Ficin reprend la métaphore de Platon où il conte que « notre âme,
après avoir contemplé les idées (justice, beauté, sagesse, harmonie) à l’état
pur dans les cieux, se retrouve dégradée par les désirs des choses
terrestres. Pour y échapper, l’âme peut s’envoler grâce à deux ailes, deux
vertus : la justice qu’on obtient grâce à un comportement moral actif
représentée sur le mur de la gravure par une balance à fléau, et la sagesse,
comportement contemplatif. Le fait que Dürer représente sa Mélancolie avec
des ailes pourrait en être un écho. Sur le mur de la bâtisse, un sablier, une
cloche, un cadran solaire et un carré magique de 4x4. Le carré magique est
situé dans le coin supérieur droit de la gravure. Les numéros 15 et 14
apparaissent dans le milieu de la rangée du bas, indiquant la date de la
gravure, 1514. Le 5, placé la tête en bas, peut s’expliquer par le fait que
les chiffres arabes, d’abords utilisés dans l’abaque, n’étaient pas encore
stabilisés, cela ne peut s’appliquer au 9, gravé à l’envers comme vu dans un
miroir. D’autant qu’il existe un second état de la même gravure plus
largement diffusé, où la position du 9 a été rectifiée. Le carré chiffré n’est pas
accroché au mur comme le sont la cloche, le sablier ou la balance, il en fait
partie, construit comme une fenêtre selon les plans de l’architecte. Selon la
remarque d’un proche de Dürer, qui traduisit en latin sa théorie de la
proportion humaine. : il faut observer à la presque fenêtre la toile
des araignées, ainsi les nombres, comme des araignées dont le rôle est de
tisser un diagramme à l’aide d’un fil, vont de 1 à 16 structurant un gnomon
carré magique ; les sommes dans chacune des lignes, colonnes et
diagonales, ainsi que la somme des quatre nombres du milieu, sont toutes de
34. En outre, toute paire de nombres placés de façon symétrique par rapport
au centre du carré conduit à la somme 17, une propriété qui rend le carré
encore plus magique. Et je vous passe toutes les combinaisons possibles
donnant une somme magique. Les astrologues de la Renaissance pensaient que le
carré magique pouvait servir de traitement contre la mélancolie perçue comme
état dépressif. Cet être ailé est donc entouré d’une collection d’objets et
d’instruments ayant un rapport à la géométrie (un compas, une règle, une
sphère, un polyèdre), au travail artisanal ou alchimique (un rabot, un
gabarit pour moulures, un marteau, des clous, des tenailles, une scie, un creuset,
une échelle, une balance, un sablier avec un cadran solaire), aux nombres (un
carré magique), à la littérature (un encrier, un livre fermé, une tablette)
et à la musique (une cloche), collection d’objets qui donnent à penser aux
arts libéraux. Symboliquement, Dürer a réuni tout cela dans une image,
symboliquement Selon ses propres notes
accompagnant un dessin préparatoire du putto, Durer nous apprend que, dans Melencolia
I, les accessoires sont tous chargés d’un sens emblématique : «Schlüssel
beteut Gewalt, Beutel beteut Reichtum ». Cette courte inscription, que l’on
peut traduire par « la clef désigne le pouvoir, la bourse la fortune » est le
seul commentaire qu’il fit. Cela est à déchiffrer dans la gravure avec le
ruban, qui pend de la ceinture de l’ange, avec, à son bout, un trousseau de
clefs et dans les replis de la robe, comme tombée, une bourse. Mais, aussi
laconique qu’elle puisse paraître, cette note confère à chaque objet une
signification symbolique et nous livre la formule qui commande à leur
répartition. Dürer considère la richesse comme revenant de droit à l’artiste.
Dans ses instructions à l’usage des peintres il affirme : « Si tu es pauvre
tu peux atteindre à beaucoup de pouvoir par cet art », et : « Dieu donne un
grand pouvoir aux hommes de talent ». Dürer dessine un ange qui est familier
de l’esprit des mathématiques et de la géométrie ainsi que des possibilités
techniques qui en découlent mais qui se fige dans la contemplation face à
l’infini. Nous savons, aujourd’hui, que Dürer exprimait aussi sa propre
résignation devant l’impossibilité de pouvoir trouver le secret de la beauté
avec les seuls moyens de la rationalité, des mathématiques et des mesures.
Dürer s’interroge sur les limites des actions et du savoir humains avec le
doute d’un artiste, perpétuellement inquiet ; il écrivait : « il n’appartient
qu’à Dieu de soumettre, à la mesure, la beauté absolue». Lucidité,
scepticisme ou pessimisme de Dürer dans un temps qui affirme au contraire un
humanisme triomphant. Dans le dédale de ces
interprétations, aucun commentateur n'a encore
réussi à donner une explication qui fasse l'unanimité. Pourtant cette réponse
existe. Elle correspond au génie plus géométrique que mathématique de Dürer
dont le dessin suit toujours un plan précis. Ceci est vrai non seulement pour
Melencolia §I mais aussi pour trois autres de ses gravures : Adam et Eve ;
Le Chevalier, la Mort et le Diable et Saint Jérôme dans sa cellule.
Ensembles, elles constituent une tétralogie fondée sur l’ancienne théorie des
quatre humeurs comme l’atteste le titre inscrit par son auteur sur les ailes
déployées du petit dragon volant : Melencolia §I, attribuée à
Saturne parce que cet astre était alors considéré comme la première et la
plus haute des planètes. L’anagramme de Melencolia, limen caelo, ou «
porte vers le ciel », est l’image que l’on retrouve sur le blason familial de
Dürer. Alors j’ai tiré des traits, une
échelle s’est dressée sur le corps du personnage principal, parallèle à celle
contre le mur ; l’ange, qui est bien en train de lire le phylactère, a son
regard pointant sur le O ; j’ai trouvé des contours de cercles de rayon
identique à celui de la sphère, délimitant ainsi des régions d’importance, le
visage de l’ange, sa main qui tient le compas, le visage du putto, le cœur de
la pierre, le soleil ; j’ai articulé le carré pour qu’il devienne carrés
longs. L’ensemble des symboles, ceux de la pierre, des outils, les références
aux nombres, la présence d’un astre, les mystères font, pour moi, de cette
gravure une hypostase d’un tableau de loge. Cela a enchanté ma rêverie, ma
recherche m’a donné un peu plus d’intimité avec l’ange avec qui je me suis
mise à dialoguer, il me dit : tu vois le dragon là-bas, il ricane dans la
lumière, il croit que ma mélancolie est de n’avoir pu réaliser plus de
beauté, de n’être que ce dont je suis capable, de n’être pas un ravissant et
studieux putto, de n’être qu’un rêveur qui ne sait même pas guérir. Mais non, lui dis-je, le dragon
n’est qu’une chauve-souris, il nomme seulement ce que tu ressens, il ne sait
pas ce qu’il en est. C’est vrai, poursuivit l’ange, dans le fond, pourquoi
écouter le ciel, ici tout peut être sagesse, force et beauté. J’étais avec
l’ange qui avait fait une pause dans son travail. Le regard au loin qui
regardait sans voir, il n'était pas dans la vacuité, il vivait charnellement
le temps présent qu’il avait saisi. Peu à peu, je devenais lui, mon
âme-frère, j’étais au pays des enchantements, le temps s’est arrêté et j’ai
vu la mer. |
RÉFLEXIONS
SUR LES DEUX COLONNES ET
LE TEMPLE
Roland Bermann |
Parler des colonnes ne peut se dissocier
de l’orientation du Temple et de son agencement. Pour une description
complète un plan du Temple de Jérusalem et des vues “en situation”, voir le
site : La situation des colonnes découle
de l'orientation du Temple. Pour les uns, selon les commentateurs de notre
ère, le Temple était orienté le long d'un axe Est - Ouest et pour les autres
Ouest - Est. Or si l’on se réfère à la Bible, il ne devrait pourtant pas y
avoir d'ambiguïté sachant qu'en hébreu “droite” signifie toujours Sud et
“gauche” Nord, de ce fait on a l’indication d'une orientation tournée vers
l'est, ce qui se retrouve clairement dans les commentaires hébreux. Il est à
noter que plusieurs termes sont utilisés pour exprimer Nord et Sud, mais cela
nous conduirait à une recherche philologique qui n’est pas de mise ici. De
plus, les Chroniques mentionnent: “quant à la Mer d’airain, il l'avait placée
à distance du côté droit (sud-est), du côté de Jakin”. En
conséquence, le Temple était construit comme indiqué sur le schéma
suivant : Notons que
dans les Rites Maçonniques la Loge se trouve être orientée selon l'axe Ouest
– Est, le V\M\étant à l’Orient, cette orientation étant calquée sur celle des
églises occidentales orientées vers Jérusalem, donc vers l’Est. C’est une
orientation inverse de celle du Temple Jérusalem. C’est là un phénomène
culturel absolument normal, mais il convient de se souvenir que Loge et
Temple sont deux notions différentes, particulièrement au RER. Pour ce
qui est de la signification attribuée aux noms des deux colonnes nous
avons : ·
Boaz [בעז] (dans la force, la puissance) traduit la force, mais autre
que physique. Elle évoque une force supérieure, la force spirituelle de
conscience de l'indestructibilité de l'être réel, l'Esprit. ·
Jakin [יכין] (Dieu le soutient) exprime la solidité,
la stabilité; elle signifierait que l'initié a dépassé le stade des
fluctuations humaines et atteint l'état de l'Être se tenant dans l'éternel
présent. La
position des deux colonnes a souvent été mise en rapport avec les positions
solsticiales des deux St Jean, positions qualifiées de Portes des dieux et de
Porte des hommes. Voir à ce propos Jean Tourniac “Symbolisme maçonnique et
tradition chrétienne” Dervy, chapitres traitant des deux Saint Jean. Nous
pouvons, à partir de là, trouver, dans l'identification de Jakin et Boaz faite
respectivement à la porte
des dieux et à la porte
des hommes une confirmation de leur dénomination. On peut
alors établir le schéma suivant en considérant l’orientation du Temple, il
est à inverser en prenant celle de la Loge : L'angle formé par les deux
directions associées au lever du soleil aux solstices d'hiver et d'été dépend
de la latitude du lieu de l'observateur. On a
beaucoup glosé sur le symbolisme de la position des colonnes et de son inversion
selon les Rites. La réalité historique de cette inversion résulte très
simplement de ce qui s'est produit Grande-Bretagne lors du conflit entre
Ancients et Moderns. Suite aux diverses divulgations, les Moderns ont inversé
les colonnes et c'est ce qu'ont repris les rites continentaux dits modernes :
RF et RER. Pour l'histoire de cet épisode voir René Désaguliers “Les deux
grandes colonnes de la Franc-maçonnerie” Editions Dervy En ce qui concerne le RER et le
RF, Jakin et Boaz sont situées respectivement au nord-ouest et au sud-ouest.
En conséquence, l’on peut envisager que Jakin est associée au solstice d'été
et Boaz au solstice d'hiver. Cette inversion par rapport à la disposition du
Temple de Jérusalem correspondrait à une vision exclusivement terrestre (au
lieu de céleste) où la voie de la clarté est tournée vers la pleine lumière
ou le sud terrestre (au lieu du Nord céleste) et la voie de l'obscurité
orientée en direction des ténèbres ou du nord terrestre (au lieu du Sud
céleste). En effet, cette inversion serait conforme à la “Table d'émeraude”
qui stipule: “ce qui est en haut (dans l'ordre céleste) est comme ce qui est
en bas (dans l'ordre terrestre)” et inversement. Ou encore selon les paroles
de l'évangile, “les premiers (au Ciel) seront les derniers (sur Terre)”. Mais
ces considérations ne sont que des stipulations modernes et ne sont très
certainement jamais intervenues dans l’établissement originel des
orientations dans nos rituels.
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LA TOLÉRANCE SAM ECHED |
SI TU DIFFÈRES DE MOI MON FRÈRE, LOIN DE ME LÉSER, TU M'ENRICHIS
" (A.de St. Exupéry). Les Francs-maçons enseignent et proclament qu'ils doivent être
tolérants. Comment devons nous introduire et pratiquer cette tolérance dans
notre vie quotidienne ? La tolérance pour les maçons, n'est pas seulement une
façon de vivre dans le cadre de notre ouverture sur le monde ainsi que nos
réactions, visions et nos propres idées sur le Divin, sur l'humain, le social
et de ce que devrait être la communication avec nos frères ou notre prochain
en général. Ces visions et ces idées se confondent et sont généralement
intégrées les unes aux autres. Dés la prime enfance, nous
commençons à réagir aux premières images que nous recevons de notre
entourage, et aux signaux que nous percevons à l'état brut, avec nos
cinq sens, ... comme ils nous viennent de l'Autre et de la société qui nous
entoure. A un stade plus avancé, arrivent les expériences, venues du monde
non sensoriellement perceptible. Tout ceci est défini et formé à partir de
nos gênes, notre personnalité innée, de nos capacités propres, de la qualité
de notre éducation et de la première communication entre nous et nos parents. Un homme sain et normal, est programmé par ses gênes, ses
composants de base et ses premières impressions, pour percevoir l'Être
Suprême, ses prochains et la société dont il fait partie ; comme une totalité
harmonieuse, lui donnant confiance, … et en son entourage, … et en
lui-même. Cet homme, sain d'esprit, ne se sentira jamais menacé. Chaque homme
vivra des hauts et des bas et son mode de réaction sera une image dynamique
et vivante, basée sur des impressions, des perceptions et des événements se
renouvelants sans cesse. Pour l'homme d'aujourd'hui, ce fardeau est devenu encore plus
lourd que par le passé. Jamais de mémoire d'homme, il n'y eu un tel afflux
d'informations, ... par la presse parlée ou écrite, la télévision, Internet
... e-mail … et j’en passe La majeure partie de cette information est ressentie
comme agressive et menaçante. ... L'homme, parti de la vie en société,
continue sa tâche et son devoir d'amour de sa famille et du prochain. Il
réagit selon ses moyens, à tout ce qui lui arrive de cette société, et
certainement à tout ce qui se passe dans son propre voisinage. Certains osent appeler tolérance, une condescendance, un
isolement délibéré, tant envers son entourage qu'’envers les autres, aussi
bien par la parole et que par la conduite. Cette condescendance, cet isolement
ou cette inertie,... cette lâcheté,... reçoit bien à tort une fausse
connotation de haute moralité. La plupart d'entre nous accepteront, tout
naturellement, que la tolérance est de rigueur, quand il s'agit de religion
ou de philosophie. La tolérance raciale ou sociale par contre, a malheureusement
ses limites pour beaucoup d'entre nous. Elle s'arrête lâchement là où nous
pensons que notre propre façon de penser et de vivre est menacée, scandant le
slogan : Je ne touche pas à ton mode de réflexion ou à ton mode de vie, si tu
ne touches pas au miens ". Une société humaine, divisée en races, en castes, en rangs, en
niveaux, ou en échelle sociale, peut sembler ordonnée, mais elle est vraiment
inhumaine. Chaque barricade, conduit à des divisions et à des frontières
Nord/Sud, à l'exemple du 38e parallèle Coréen, aux murs de Berlin ou de
Jérusalem, et même ces derniers, ne se sont pas avérés imperméables, aux
hommes, aux livres, aux images ou même aux idées. La tolérance active voit le
jour, quand il y a en nous un espace actif d'écoute et d'interrogation et
quand il y a une possibilité de communication entre humains, ou quand il
existe la volonté de rechercher ce qui unit les gens et non ce qui les
sépare. ... Nous devons être à écoutes de notre prochain et le voir, avec
les oreilles et les yeux du cœur, donc avec amour. Pour cela, il nous faut
d'abord faire une toute petite place dans notre pensée et notre cœur, ... et
ainsi pouvoir étudier la possibilité minimale, que cet homme, qui pense si
différemment de nous, peut nous apporter quelque-chose qui nous est encore
inconnu, mais qui vaut peut-être la peine, qu'on en prenne connaissance sans
préjugé. C'est seulement a ce moment là, que peut s'épanouir et se développer;
la vraie tolérance, parce que nous remettons en question, une partie de nous
même et de nos propres convictions. Alors seulement, peut germer l'idée, que notre soi-disant
opposant a découvert, sur sa route, une petite fleur que nous n'avions pas
remarquée. Peut-être a-t-il mieux perçu un phénomène ou l'a-t-il mieux interprété
?.... Cette interaction réciproque s'avérera toujours enrichissante et
fructueuse. Pour cela, nous devons laisser agir sur nous les valeurs, vérités
et réalités de chacun, sans nous cabrer uniquement sur nos propres points de
vue et valeurs. Car nous devons partir du principe, que personne ne possède
la vérité absolue. À côté de notre façon de vivre et de penser, il existe une
quantité innombrable de variations et de choix, et chacun, quel qu'il soit, a
droit à sa propre réalisation, dans sa quête vers la maximalisation du
bonheur humain. Ceci est totalement différent de la tolérance passive actuelle,
qui dans la pratique quotidienne est beaucoup plus difficile et compliquée
à exercer que la fameuse tolérance maçonnique que nous exerçons dans
l'intimité douillette d'une loge, avec un nombre restreint de frères qui sont
passés par le même crible que nous, et qui ont donc le même modèle de pensée
et de communication que nous En résumé : la
tolérance pour être enrichissante, ne peut-être qu’active. Nous devons
accepter et défendre le droit de chacun à la différence et ne pas vouloir à
tous prix, amener ou niveler l’Autre, à nos valeurs. Rappelez-vous, que
d’après nos Sages, Sodome à été détruite par le GADLU, uniquement parce que
son inhumanité consistait à niveler tous le monde à
leur mesure. D’après le Talmud, ils avaient un lit spécial sur la
Grand-Place. Ceux qui à son aune étaient trop petits, étaient écartelés et
ceux qui étaient trop grand, étaient découpés à ses mesures. |
DURKHEIM
- DE DURKHEIM A
MAUSS - L’INVENTION DU
SYMBOLIQUE |
Camille Tarot |
Edition Au bord de l’eau |
2015 |
S'il fallait résumer d'un mot ce qui fait le propre de la
pensée française vivante du XXe siècle, on devrait dire, à coup sûr, qu'elle
a été, qu'elle est encore une pensée du symbolique. Qu'on pense simplement à
l'analyse par Claude Lévi-Strauss de la " fonction symbolique ", ou
à l'opposition établie par Jacques Lacan entre le réel, l'imaginaire et le
symbolique. Or, montre ici de façon lumineuse Camille Tarot, c'est dans le
creuset de l'Ecole sociologique française que l'acception moderne du terme a
été forgée, et c'est grâce à la lente et subtile évolution que Marcel Mauss a
fait subir aux analyses durkheimiennes du sacré, de la religion et des
représentations collectives, qu'il en est venu à prendre toute sa portée. C'est l'histoire passionnante de cette invention du concept de
symbolique que nous livre le présent ouvrage, dans un style à la fois limpide
et époustouflant. Au-delà d'une reconstitution sans précédent de la pensée
des deux plus grands représentants de l'Ecole, Durkheim et Mauss, elle nous
offre, en prime, une histoire de l'ethnologie, des sciences du langage et des
sciences de la religion jusqu'au premier tiers du XXe siècle. Ainsi des liens
intelligibles sont-ils à nouveau établis entre la pensée française des
soixante dernières années et ce qui l'a précédé. Et peu à peu, on se prend à
rêver d'une reprise du dialogue entre philosophes, ethnologues,
psychanalystes, sociologues, spécialistes de la littérature ou de la
religion, qui trouveront tous ici également matière à nourrir leurs
réflexions. Car ce que C. Tarot nous restitue comme s'il y était, comme si
nous y étions, c'est l'exceptionnel travail collectif de la pensée . |
CONTE SOUFI
A MḖDITER |
Arcadia |
|
2014 |
Il était une fois un vieux sultan
qui, pressentant la mort approcher, réclama son fils à son chevet afin de lui
léguer ce qu’il avait de plus précieux : un bel anneau d’or surmonté d’une
volumineuse pierre bleue sous laquelle on pouvait dissimuler une mèche de
cheveux, le souvenir d’un être aimé ou du poison destiné à tuer un ennemi. « Tu vois cette bague, dit le
sultan, à l’intérieur tu trouveras la solution au pire des problèmes de
l’existence. Passe-la à ton doigt et promets-moi de
ne l’ouvrir qu’au moment où tu n’auras pas d’autre choix, car la solution
magique qu’elle contient ne te servira qu’une seule fois ». A peine eut-il prononcé ces mots, le vieux sultan rendit son
dernier soupir. Quelques années plus tard, le
nouveau sultan régnait sur un royaume prospère et en paix. La favorite de ses
épouses s’apprêtait à donner naissance à un fils, un héritier pour le trône.
Malheureusement, la jeune femme mourut en couches. Désespéré, le monarque
resta prostré au fond de ses appartements durant de nombreuses semaines. Il
refusait de s’alimenter et plusieurs fois il pensa à se donner la mort. La
tentation de soulever la pierre bleue qu’il portait à son doigt était grande.
Pourtant, il se rappela la promesse faite à son défunt père : il n’ouvrirait
la bague qu’en cas d’extrême nécessité. Il décida donc de la garder close
car, au fond de lui, il sentait qu’il pourrait se relever de la douloureuse
épreuve qui l’accablait. Les années passèrent. Jusqu’au
jour où, soudainement, le petit prince héritier fut atteint d’un mal
mystérieux et décéda. La douleur du sultan fut très grande. La perte de son
enfant chéri raviva la blessure causée par la mort de son épouse bien aimée.
La vie ne semblait avoir aucun sens. Qu’avait-il fait pour mériter un sort
aussi cruel ? L’homme sombra dans une profonde dépression. Aucune de ses
épouses n’arriva à le consoler. Aucun de ses amis ne trouva les mots capables
de lui redonner l’envie de vivre. Aucun de ses ministres ne fut autorisé à
l’approcher. Les affaires du royaume se dégradèrent dangereusement. Le sultan tomba malade. Le
médecin appelé à son chevet lui proposa d’ouvrir la belle bague bleue. Le
sultan refusa. Il n’avait pas oublié sa promesse. « Laisse-moi du temps,
dit-il à son médecin. Je sens que j’ai en moi la force de trouver le chemin
qui me reconduira à la vie. »Le sultan renoua avec la vie. Certes, il n’était
plus tout à fait le même. Son visage affichait un air grave. Cependant, au
fond de lui, il se sentait plus solide. Deux fois, il était tombé ; deux
fois, il s’était relevé. Un léger sourire trahissait la confiance qu’il avait
gagnée au cours de ses épreuves. Puis l’impensable se produisit :
une révolution au palais. En quelques heures toute la famille du monarque fut
décimée. Ses épouses égorgées, ses enfants empalés et, lui, jeté au fond d’un
cachot. Anéanti, le sultan remarqua soudain l’éclat de sa bague dans
l’obscurité. Quel espoir lui restait-il ? Sa mort était proche. Le temps
était donc venu de soulever la belle pierre bleue. C’est ainsi que le sultan
décida d’ouvrir la bague de son père. À l’intérieur, se trouvait une
plaquette en ivoire. Sur celle-ci, il était gravé en lettres d’or : « Ne
t’en fais pas. Cela aussi va passer ! » |
RḖFLEXION SUR LA
SOLITUDE |
|
Arcadia |
2014 |
La solitude a au moins
deux sens. Elle implique souvent un isolement douloureux, certainement
ressenti par beaucoup d’entre nous. Et comme chaque expérience personnelle a
un intérêt pour tous, il serait bon que ceux qui l’ont éprouvée nous en
fassent part. Trois sens connexes peuvent être donnés au mot solitude : 1°
son aspect psychologique, émotionnel, 2° l’isolement dans le sens
d’indépendance pouvant être ressenti agréablement lorsqu’on vit dans un cadre
oppressant, fût-ce celui de la famille, 3° la solitude, manque de contact
avec les autres, mais aussi le sentiment d’être un être en soi et à la limite
l’absence de l’autre n’est plus éprouvée comme bonne ou mauvaise, parce que
la différence entre les êtres et les choses est abolie. . Voici quelques
réflexions : On ressent la solitude quand on n’est pas
sur le même plan que les autres. Elle n’est pas une souffrance pour tout le
monde. Ma solitude n’est pas d’ordre humain, mais divin, il manque le contact
que l’on pourrait avoir, mais comment l’atteindre ? Est-ce vraiment d’ordre spirituel ? N’est-ce
pas l’angoisse éprouvée lorsqu’on fuit une zone de sécurité et qu’on est
obligé, seul, d’affronter quelque chose de nouveau ? Pour un autre cette solitude n’est pas
encore vraiment ressentie. La recherche se fait seul
dans son coin. Dans la vie on est toujours seul quelles que soient la
situation ou la famille. C’est une bonne chose qui oblige à se scruter
soi-même et qui peut amener à Dieu, à son omniprésence. D’autre part on n’est
jamais seul quand on peut rendre service à d’autres. Il ne devrait pas y avoir de solitude
spirituelle, je ressentais la solitude lorsque j’étais dépendant de toute
partie physique, émotionnelle, pulsionnelle en moi. Il était nécessaire que
j’acquière une certaine indépendance et que je fasse une coupure brutale avec
la notion du père et de la mère. Et alors cette solitude devenait satisfaisante,
mais parfois angoissante. Ce qui me préoccupe, c’est la différence entre
indépendance et autonomie, cette dernière ne m’obligerait pas à me couper des
autres et m’apporterait un contact avec la Réalité, car je suis arrivé à
cette conviction que « les autres » sont ce qui n’est pas encore moi, je ne
les ai pas encore intégrés. N’est-ce pas le monde qui doit vous intégrer
? C’est précisément dans ces différentes
nuances que se situe ma recherche. Il ne faut pas d’aliénation ni d’un côté
ni d’un autre. C’est difficile à expliquer. Il y a deux niveaux de communication, celle sur le plan humain, sur le plan
moral, elle est rare, et peu de gens ont de vrais amis. L’autre est celle où
l’on est à l’écoute de l’écho qui peut venir. On écoute le silence de
l’autre. Celui qui part dans une
recherche est isolé, le comportement avec les autres en est souvent altéré,
parce qu’on se croit nettement divergent. L’étude de la pensée traditionnelle
opère un changement dans l’inconscient qui fait que c’est beaucoup moins soi
qui pense. Il y a aussi une certaine implantation dans l’être qui pense
autrement que ne pense le moi courant. On vit sur deux plans, celui de
l’expérience avec l’ensemble des réactions psychiques que comprend ce
sentiment d’isolement, et simultanément on est conscient que cela a un
certain cachet d’irréalité et là alors il n’y a plus de solitude en tant que
sentiment d’isolement, on se rend compte que ce n’est qu’un filet d’eau dans
tout le torrent de l’existence sensorielle et psychique qui est alors vécue
comme un provisoire. Il y a une certaine préhension du caractère
non-essentiel du vécu au profit du non-vécu. Dans la pratique de la
méditation la solitude n’est pas ressentie, mais une certaine indépendance.
C’est l’état sans penser qu’on appelle « dhyana ». A ce moment il n’y a plus
ni moi, ni les autres. On sent bien que quand on a quitté cet état, le monde
est toujours là et se repolarise en intensité et en exigence et que la
présence du monde et son élimination sont jusqu’à un certain point, soumis à
la volonté ; et on découvre que la pensée, la partie du monde la plus fugace,
est la moins nécessaire. En résumé, on peut très bien être à la fois en état
d’isolement et se rendre compte qu’il y a autre chose. A ce moment on
travaille sur deux plans. Et, en troisième lieu il y a la méditation qui
permet d’expérimenter ces choses. Il y a un premier sentiment d’isolement
quand on rompt avec les sentiers battus des traditions et qu’on est obligé de
se reconstruire intérieurement. Puis au fur et à mesure que se précise la
recherche, il se produit un retournement des valeurs et on ne parle plus le
même langage que le commun des autres. Finalement s’établit une communication
avec les autres, quelle que soit leur attitude dans la vie, du fait que nous
sommes tous d’une même essence et que malgré toutes ces divergences, il y a
quelque chose qui joue, qui perçoit l’essence des êtres et alors il n’y a
plus de solitude. Ne pourrait-on dire que la Réalité qui est
inconsciente dans l’être, s’exprime à travers la manifestation qui n’est
qu’un aspect de la Réalité. Et comme nous nous identifions à cette apparence,
nous sommes frustrés. Mais à travers cette frustration et les avatars de
l’existence se produit un déclenchement de la conscience qui se rend compte
que tout cela n’est pas la Réalité. Nous ne voyons pas le Réel, nous ne voyons
que la façon dont il se manifeste. Lorsque nous voyons un objet en bois, nous
ne voyons que l’objet qu’il représente et non le bois. Or finalement c’est du
bois et non un objet. Il y a une intuition qui nous permet de constater
l’existence des choses et non du monde et de voir que celui-ci n’est pas
aliénant, parce qu’il ne manifeste rien qu’un même inconnaissable, mais qui
est tout ce qui est connu. La conscience individuelle est aussi un de ces
objets. De quoi est-elle faite ? C’est une question qui s’impose quand on
fait beaucoup de méditations, on se demande « qui est-ce qui voit ? » Il y a
un être psychique qui voit, une conscience, et puis il y a quelque chose qui
est vu. Dans le silence, les yeux fermés, le spectateur et ce qui est vu sont
réduits à leur plus simple expression, c’est-à-dire une sensation confuse
d’identification. Le monde nous ne savons pas ce qu’il est, nous
l’expérimentons et cette expérimentation du monde est un certain type
d’expérience de nous-mêmes en tant qu’expérience et non d’expérimenté. Ce
sont des expériences différentes je parle ou j’entends. Dans la méditation le
courant sensoriel qui nous irradie sans cesse est sensiblement ralenti, nous nous
apercevons qu’il n’est pas essentiel et nous prenons simplement notre esprit
comme un écran qui n’est pas seulement à trois dimensions, mais qui a toutes
les dimensions qu’ont nos sens. Le monde c’est cela pour nous, nous
l’absorbons, nous le possédons, le monde c’est nous. Le terme solitude spirituelle n’est-il pas
un peu faux et ne pourrait-on pas parler de solitude sur le chemin ? On ne
s’arrête pas pour contempler, la recherche continue, mais dans un sens assez
déterminé. Certains, très rares, s’arrêtent comme ce fut le cas pour le
Maharshi. Il y a là une ascèse. C’est un travail d’autodestruction qui ne
peut aboutir qu’à la mort des instincts, des désirs. C’est la mort de
soi-même et c’est dans cette mort qu’il y a la résurrection. Le Maharshi a dit
« La solitude est une attitude mentale. L’homme attaché aux choses de ce
monde ne peut l’obtenir où qu’il soit. » Après quelques années de recherche,
il n’y a plus de solitude sur le chemin, car l’on rencontre des gens qui sont
du même bord. Cela prend du temps |
RÊVES D’ABORIGḔNES EN
AUSTRALIE |
Arcadia |
2015 |
|
Chez les Aborigènes
d’Australie, le « temps du rêve » est le mythe fondateur de la société
humaine et en même temps sa référence, son idéal. Le rêve, lui, est un
contact établi entre les hommes et le monde divin, et l’interprétation des
rêves une tâche noble et difficile qui permet de cheminer vers le divin. Le monde est né d’un rêve : « Chez les
Aborigènes d’Australie, avec quelques variantes suivant le peuple concerné,
l’activité onirique s’intègre dans le réel où elle joue un rôle actif. Comme elle
l’a fait au début des temps. Car c’est d’un rêve que le monde est né. D’un
rêve de Balamé, le Grand Esprit, l’Intelligence suprême, qui envoya sur terre
une pluie de parcelles de cette intelligence afin qu’elles matérialisent les
images reçues pendant son sommeil. Le rêve des humains est donc lui aussi
important et, à sa manière, créateur. Il est l’un des liens qui relient les
hommes avec le Temps du Rêve, référence à un monde parallèle exemplaire qui
corrige et régularise sans cesse le monde des hommes. » La Genèse
aborigène : « Le rêve étant indissociable de ce Temps primordial, il
nous faut définir ce dernier pour mieux faire comprendre le premier. Le Temps
du Rêve représente un ordre cosmologique, l’Essence qui anime l’univers.
C’est un passé qui n’a jamais commencé, qui est le présent et déjà le futur,
un exemple de vie, et dont la perpétuelle mouvance doit se refléter sur
terre. » Les premiers
écologistes : « Le devoir de maintenir vivant le Temps primordial par
des rites menant d’un site sacré à un autre imposait aux Aborigènes une vie
d’éternels pèlerins. Ils allaient, tout au long de l’année, séparés par
petits groupes, certains de trouver leur nourriture en quelques heures grâce
à la générosité de la Terre-mère. Leur origine commune avec les autres formes
de vie, empreintes comme eux de l’Energie vitale sacrée des Entités
premières, avait créé entre eux et ces dernières une parenté parfois plus
forte qu’une parenté de sang. » Un paradis
accessible aux humains : « Ce passé fabuleux continue d’exister. Sans
lui, le présent ne pourrait être puisque « le présent EST le passé latent qui
existe toujours en puissance ». (7) C’est un Espace-temps exemplaire qui
permet de critiquer la vie temporelle pour remédier à ses défaillances ; ceci
en trouvant dans la succession des événements qui créèrent le monde,
(événements répertoriés dans les mythes), la manière d’accorder la
transformation du monde temporel à celle du Temps du Rêve. Il maintient les
individus dans le droit chemin car, s’il sécurise, il punit aussi tout
comportement contraire à ses règles morales. Il représente la Loi. Une loi
souple quant à la forme, implacable quant au fond. (…) Aujourd’hui,
chaque homme est certain d’avoir séjourné, lors de sa préexistence, dans
l’une des réserves d’esprits laissées sur son territoire par un Héros des
Temps mythiques, son « Rêve » ou totem ; chaque homme est certain d’avoir été
autrefois ce Héros. Pour le redevenir fugitivement, pour retrouver en partie
Sa mémoire il lui faudra de longues années d’initiation. Il lui faut tout
d’abord subir une deuxième naissance, celle de son corps spirituel, son yowie
(8) invisible. Les Aborigènes pensent en effet que l’humain est formé de deux
corps. » PLACE ET FONCTIONS DU REVE/ Le rêve, assistant de la loi : « Les
Aborigènes ignorent ou se moquent de nos hypothèses, de notre méconnaissance
des expériences oniriques. Pour eux, le rêve représente « la mémoire du passé
et la source des métamorphoses de la société ». » Le rêve, révélateur de
l’inconscient collectif? « Les rêves sont
classés suivant les messages qu’ils transmettent. On peut citer les rêves
anodins, oubliés dès le réveil, les rêves amusants, les rêves médiateurs, et
les rêves révélateurs/innovateurs. Tous jouent un rôle dans de multiples
domaines de la vie temporelle. » « Les
rêves-médiateurs interviennent lors de décisions politiques ou de toute autre
action qui s’avère litigieuse. Par exemple, le changement de personnages
importants, comme celui d’un maître de cérémonie, peut se faire lorsque un tel changement a été vécu en songe. Ne peut-on
voir l’origine de ce rêve dans un désir collectif inconscient d’un tel
changement ; désir tout aussi inconsciemment capté par un individu qui, un
jour ou l’autre, l’extériorise par un songe. Quoi qu’il en soit, la «
modification » se fait avec l’accord de tous, même de celui du dépossédé: on
ne discute pas la Loi venue du monde des songes. » L’art: le thème
onirique le plus fréquent : « Quant aux rêves-révélateurs-innovateurs,
ils font connaître un événement du passé, du présent ou de l’avenir. Certains
de ces rêves sont très importants car ils concernent le maintien de la force
d’action transcendante de toutes les formes d’art et d’objets sacrés qui
participent aux rites ; ils concernent également le maintien du pouvoir des
armes. C’est un songe qui révèlera à un homme ou à une femme quelle «
technique » doit être utilisée. Le rêveur recevra l’image du nouveau symbole
à graver sur le tjuringa (…) » Le rêve, facteur
d’immortalité d’une civilisation : « En imposant une perpétuelle transformation
des formes du rite, le rêve est sans doute l’un des facteurs qui contribue à
maintenir intacte la foi des Aborigènes depuis des dizaines de milliers
d’années. En effet, en réactualisant leur liturgie, c’est-à-dire en «
modernisant » les « techniques » de leurs parents, ces hommes surent éviter
la lassitude pour des pratiques rituelles trop anciennes. Transformées un
tant soit peu, elles deviennent autres ; ils les perçoivent alors comme leur
Création. » Le rêve, un monde
où vivants et morts dialoguent ‘ : « C’est également pendant le séjour
dans le monde du rêve que les vivants rencontrent les morts. » L’assistant des
poètes : « D’autres rêves, les rêves-totems, souvent rêves-poésie, sont
perçus comme les assistants des « songmen » et des
Grands Sages. En effet, ils leur apprennent de nouvelles chansons, de
nouveaux vers, vers masculins ou féminins suivant le sexe du dormeur : ici,
la poésie joue un rôle important et ses règles sont subtiles. » L’INTERPRÉTATION DES REVES : Une clé des songes flexible : « Le
rêveur interprète certains de ses songes lui-même. Par exemple, s’il rêve
d’une dispute avec l’une de ses épouses, il traduit par une dispute à venir.
S’il rêve de l’infidélité de sa femme, c’est une dénonciation venue du monde
invisible. En ce cas l’expérience onirique joue deux rôles, celui de
révélateur mais aussi de modérateur des pulsions humaines car, dans un
couple, la possibilité d’un tel songe accusateur modère évidemment les
aventures extra-conjugales. Notons que certains peuples aborigènes pensent
que les évènements de la vie quotidienne ne peuvent exister avant d’avoir été
vécus dans le monde des songes. L’interprétation
des rêves varie d’une région à l’autre. Partout elle est fort souple, tenant
compte du lieu où s’est fait le songe, des évènements des jours précédents,
de la cérémonie à venir, etc. De plus, elle peut être reconsidérée après
quelques jours. Il ne semble donc pas exister de clés des songes définitives.
» L’homme des mondes
invisibles : « Cet homme, à l’intelligence supérieure, est un personnage
aux pouvoirs fabuleux, respecté de tous ; un médium entre le monde des
vivants et des morts. Chez l’un des peuples du centre, son statut de Grand
Sage, d’homme de Grand Savoir, lui vient d’un rêve, un rêve très particulier
sur la mort, qui clôture de longues et difficiles années d’enseignement.
Mieux que tous les autres, le Grand Sage a su retrouver sa mémoire du Temps
du Commencement. » |
CASTOR ET POLLUX - |
DIVERS AUTEURS |
ARCADIA |
2010 |
De
quoi je vous parle? Qui sont ces «moi»? Comment les voir?
En quoi entrent-ils en résonance avec moi? Pourquoi le font-ils? Comment le
font-ils? Comment et pourquoi les rassembler sous une même volute? Comment
les pousser dans un égrégore unifié afin de ne plus pouvoir vous accrocher,
de ne plus être en état de parler par vous et de faire porter leurs désirs
sur vous? Voilà bien des questions à répondre pour activer, chez vous, une
action volontaire et consciente vers la compréhension de l’arcane XIX, l’oeuvre solaire permettant votre descente vers
l’Essence pour atteindre l’Être. Verrons-nous la différence avec le mythe de
Castor et Pollux et celui de L’Arcane XIX ou celui de La Belle Et La Bête
pour atteindre l’état Androgyne? Cet état unifie le haut et le bas de l’Arbre
de Vie en vous, non pas le moi inférieur embrasé dans le Feu du Père mais l’essence logée dans le moi inférieur incarnant le
Moi supérieur dans l’essence de l’Être. Je cite un rappel de cet arcane du
Tarot du Sepher de Moïse. «Dans la représentation
hiéroglyphique de ce Nombre Dix-Neuf, dans la lame du livre de Thoth, nous
voyons Le Soleil à son zénith au-dessus de deux enfants, l’un mâle et l’autre
femelle et qui se réunissent par les bras, symbolisant ce mariage alchimique
des contraires, et la réunion d’Adam et Ève, de l’époux et l’épouse du
Cantique des cantiques de Salomon, ce retour à
l’androgyne qui est l’état homogène de la Conscience. À leurs pieds un
parterre fleuri en forme de cercle, indique la sortie possible du cycle des
réincarnations par ce retour à l’homogène (l’Universel). La maîtrise des
Dix-Huit premiers Nombres, et leur synthèse par l’analogie des contraires
fait de ce Nombre Dix-Neuf, celui de la Sagesse, l’intelligence en action par
la maîtrise des Puissances et des Vertus». Quant au mythe de Castor et
Pollux, il rétablit la même union : ils ne sont pas la représentation lunaire
et solaire mais ils sont l’Homme, l’Adam d’avant
la chute, à la fois Ange et Bête. Cet état survint lorsque Castor eut
rejoint cet ancêtre divin Adam et la source suprême (Zeus), les deux dioscures n’en firent
plus qu’un. C’est en souvenir de cette victoire mémorable, que Zeus
fit la constellation des Gémeaux.» (R.Emmanuel, La
Mythologie de la Grèce Antique, p.123) Castor et Pollux Les enfants
de Leda :
Voici un bref aperçu de l’histoire de Castor et Pollux. «À Sparte :
Zeus s’unit à Leda et de cette union naîtra Castor
et Pollux, les deux dioscures, et Hélène à
l’éclatante beauté. Leda est donc la Mère Cosmique
qui s’unit au Grand Architecte de l’univers et qui va couver le grand oeuf du monde, le Chaos. Du point de vue cosmogonique,
Castor et Pollux représentent la Création sous le signe des Gémeaux. Mais
cette création va descendre fort loin dans la manifestation. En effet, Castor
et Pollux symbolisent la Dualité entre l’Esprit et
la matière ; dans l’homme, le corps et les principes divins. Ce mythe
représente donc un raccourci de la création. … Il fait descendre
l’Esprit directement parmi les hommes, tout au moins parmi les héros.» (Idem,
p.122). Ils vivent une dualité, des contraires : «ils s’entraînent au
pugilat, montent le même cheval (le corps physique) et leurs javelots sont
semblables. On les présentait également chacun sur un cheval mais, les
chevaux vont dans une direction opposés (le corps va vers le monde matériel,
l’Esprit lui, ne connait qu’une direction : le ciel. Pollux l’emportait sue
son frère au pugilat (L’Esprit est plus fort que l’homme…) Castor excellait dans l’art de
dompter les cheveux (le cheval symbolise les passions astrales ou le corps
physique)…. Lorsque Castor meurt, son frère demande à Zeus de le faire mourir
lui aussi; Zeus répond qu’il ne peut mourir entièrement car il est de race
divine, mais s’il tient absolument à partager tout avec son frère, il devra
se contenter d’une demi-immortalité, il vivra donc comme son frère soit :
moitié de son existence sur la terre, l’autre moitié dans les demeures dorées
du ciel. Bien entendu, le corps physique se réincarne comme tous les corps
physiques et la dualité Castor-Pollux reprend avec l’alternance du jour et de
la nuit. Les dioscures vivront donc ainsi : Castor
de jour et Pollux la nuit. » On sait que le corps physique et le corps
éthérique se fatiguent dans le vécu de l’état de veille. Lorsque le corps
dort, il y a une séparation du corps astral de ceux-ci. Alors, le corps
éthérique, libéré du plan astral, peut réparer ou arriver à réparer le corps
physique. Ce qui est remarquable, c’est
que ce mythe est humain et astrologique. D’abord ce mythe est humain par sa
vie de désirs et par le mental qui les active. Il rappelle le mythe de
Prométhée. Prométhée dont le corps physique (et le
foie, organe du plan astral) se fatigue pendant le jour car il est soumis aux
passions astrales qui lui rongent le foie. La différence entre Pollux et
Prométhée, c’est que le divin Pollux va rejoindre sa famille divine, le Moi
Supérieur, pendant la nuit, alors que Prométhée se fait détruire le foie sans
pouvoir finalement se sortir de ce processus d’enfer. C’est le parfait
exemple de celui qui ne se sort pas de ses croyances : il est mangé par ses
passions et il ne peut plus se réparer car les autres corps sont aussi
coincés par les croyances sous les passions et désirs. Alors que Prométhée
renaissait pendant la nuit, le jour, le vautour des passions le dévorait.
Pollux, lui, lorsque Castor dort, il va se retremper dans sa patrie. Ce qui est remarquable aussi,
c’est que le «divin» Pollux est prisonnier de son corps physique, donc de
Castor qui vit de jour, nous donnant ainsi l’image parfaite de la descente du
Moi vers l’essence dans le corps physique, là où l’Ange et la Bête se
rencontrent. « La grande tradition
nous l’explique : Castor vit de jour dans son corps physique et celui-ci est accompagné
de tous ses corps subtils, soit l’astral, le mental et le moi; Pollux est
donc le prisonnier du corps physique. Il est coupé de son monde à lui, le
monde de l’Esprit. Castor fait ce qu’il lui plait avec son corps physique. Le
pouvoir de son frère est réduit à peu de chose, il ne peut agir que par la
voix de la conscience et Castor est libre d’écouter cette voix ou de
l’ignorer. C’st pourquoi il est dit que Castor vit
durant le jour. La nuit, il en va tout autrement, le corps physique dort.
Autrement dit, il perd connaissance, la vie physique de
Castor s’est éteinte. Pollux s’échappe du corps qui le retient
prisonnier avec les corps subtils et va vivre dans sa céleste patrie. Il est le
maître de la vie véritable à son tour, et tourne le dos à la vie terrestre (dioscures à cheval en direction opposée). Pollux est la
vie divine incarnée dans l’homme. C’est pourquoi il se sacrifie pour le salut
de son frère qui, lui, est maître dans l’art de dompter les chevaux. Nous
avons vu que le cheval était le symbole de l’intelligence et qu’il représente
le corps physique qui est le cheval de l’âme, que celle-ci utilise pour
évoluer |
SYMBOLISME DE LA MEZOUZA JUIVE |
ARCADIA |
2016 |
|
Et tu les écriras
[les mots du Chema] sur les montants des portes de ta maison et à tes
portails. - Deutéronome 6,9 ; 11,20 Le Judaïsme n’est pas une foi confinée dans les
synagogues. Dans le confort et l’intimité de nos maisons, nous aspirons
également au spirituel. Une Mézouza apposée au montant de la porte identifie
la maison comme juive, nous rappelant notre lien avec Dieu et notre héritage. Une Mézouza n’est pas, contrairement à une croyance
populaire, l’étui extérieur. La Mézouza est en réalité le parchemin qui se
trouve à l’intérieur, calligraphiée par un scribe expert que l’on appelle un sofer.
Elle contient le « Chema », un passage biblique proclamant
l’unicité de Dieu et la dévotion du peuple juif envers le Tout Puissant. La
Mézouza est alors placée dans un étui ou un boîtier en verre, bois, métal ou
tout autre matériau puis, après la récitation d’une bénédiction, est fixée au
montant de la porte. En plus de son rôle comme expression et rappel de notre
foi, la Mézouza est aussi le symbole de la protection que Dieu accorde à
cette maison et à ses habitants. Le nom de Dieu, Cha-daï, qui apparaît
au verso du parchemin est l’acronyme des mots hébraïques signifiant
« Gardien des portes d’Israël ». La présence d’une Mézouza aux
portes d’une habitation ou d’un bureau en protège les habitants, qu’ils s’y
trouvent ou non. Nous témoignons de notre révérence envers la Mézouza en la
touchant du bout des doigts et en embrassant ces derniers lorsque nous
passons par une porte qui a une Mézouza. À travers l’observance de cette
Mitsva (commandement divin), nous introduisons une mesure de spiritualité et
de sécurité dans nos foyers. La Torah nous promet également que quiconque
accomplit scrupuleusement la Mitsva de Mézouza vivre une vie plus longue et
plus prospère, de même que ses descendants, comme le dit le verset
Deutéronome 11, 21 : « De sorte que se multiplient vos jours et
ceux de vos enfants... » Une Mézouza désigne une maison ou une chambre comme
"juive" marquant ainsi la dimension vraie du lieu auquel elle
introduit. Elle doit être fixée sur le linteau droit de chaque porte de la
demeure (à l'exception des sanitaires). Le Nom divin de Shaddaï-i qui
apparaît à l'extérieur de chaque Mézouza, est expliqué par nos Sages : Dieu
est "le gardien des portes d'Israël". La Mézouza protège la maison
et ses occupants. Il faut veiller à ce qu'elle soit cachère : d'abord en en
faisant l'acquisition auprès d'un sofer (un scribe) compétent, ensuite en la
donnant régulièrement à vérifier, son écriture pouvant subir les dommages du
temps. La Mitsva de Mézouza nous indique clairement que la
synagogue et la maison d'étude ne sont pas les seuls endroits saints. Bien au
contraire, notre foyer peut et doit être un sanctuaire sacré. La
Mézouza, c'est ce petit rouleau de parchemin, sur lequel les caractères
manuscrits ont une forme particulière, et que l'on fixe au fronteau droit de
chaque pièce de la maison. Elle symbolise la sainteté du foyer juif. Elle manifeste que Dieu veille sur cette maison et sur
tous ceux qui s'y trouvent. Elle rappelle à celui qui entre que «cette
demeure est un sanctuaire de Dieu». La Mézouza contient deux passages de la Bible qui
mentionnent ce commandement : «Chema» et Vé haya» (Deut. 6:4-9; 11:13-21).
«Chema» affirme le principe de l'unité de Dieu et rappelle notre devoir
éternel et sacré de ne servir nul autre que Lui. «Véhaya» exprime la promesse
de Dieu de nous récompenser parce que nous aurons respecté les préceptes de
la Torah, et de nous rétribuer selon nos actes si nous leur avons désobéi. Au
verso du parchemin apparaît le nom de Dieu CHADAI. Ce nom correspond aux
initiales de trois mots en hébreu : Chomer Daltot Israël, c'est-à-dire
Gardien des portes d'Israël». Comment la poser? Avant
de fixer une Mézouza à sa porte, il faut dire la bénédiction suivante : Barou'h
Ata A-do-naï Elo-hénou Mélé'h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vétsivanou
Likboa Mézouza. Béni sois-Tu Eternel notre Dieu, Roi de l'univers, Qui
nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné de fixer une
Mézouza. Si l'on pose plus d'une Mézouza en même temps, on ne dira
qu'une bénédiction. La Mézouza doit être fixée : ·
En position
inclinée la partie supérieure vers l'intérieur de la pièce. ·
A la droite de
la porte, dans le sens de l'entrée. ·
En bas du tiers
supérieur de la hauteur de la porte. (1) ·
Sur
l'encadrement extérieur de la porte. Quelques lois ·
La porte
d'entrée n'est pas la seule porte de la maison où une Mézouza doit être
posée. En effet, il faut fixer une Mézouza à la porte de chacune des pièces
de la maison mesurant au moins quatre coudées sur quatre (une coudée
correspond à environ 50 cm). ·
Si la
superficie de la pièce dépasse 16 coudées carrées, alors que sa largeur est
inférieure à quatre coudées, on posera une Mézouza sans dire de bénédiction. ·
On ne met pas
de Mézouza à la porte d'une salle de bains. ·
Une maison, ou
un appartement, que l'on prend en location ne réclame de Mézouza qu'au bout
de 30 jours. Cependant, en Israël, il faut poser une Mézouza immédiatement, y
compris dans ce cas. ·
S'il n'y a pas
réellement de porte mais seulement une ouverture, il faut fixer une Mézouza
mais sans dire la bénédiction. ·
On a l'habitude
de poser la main sur la Mézouza en entrant et en sortant. Pour la prière
avant d'aller dormir, juste avant de se mettre au lit, on a l'usage de faire
de même. ·
La Mézouza peut
être posée le jour ou la nuit tous les jours de la semaine sauf Chabbat et
Yom Tov. ·
La Mézouza peut
être posée par un homme ou bien par une femme. ·
Une Mézouza
doit être vérifiée au moins deux fois en sept ans. Il vaut pourtant mieux le
faire plus souvent. De toutes les manières, cette vérification doit être
effectuée par une personne qualifiée Une double protection Le
roi David dit dans les Psaumes : «Dieu te gardera quand tu sortiras
et tu entreras, aujourd'hui et pour toujours ». Ainsi, Dieu protège l'homme qui se trouve dans la maison.
Mais Il le protège aussi quand il sort de chez lui, par la Mézouza fixée à sa
porte. Le Talmud nous rapporte l'histoire de Rabbi Yehoudah Hanassi (le
«Prince»). Il nous raconte qu’Artaban, le roi des Parthes, voulut lui offrir
un cadeau. Il lui envoya une perle magnifique. Rabbi Yéhouda, pour le
remercier, lui fit porter également un cadeau : une Mézouza. Le roi
pensa que Rabbi Yéhouda se moquait de lui; il lui dit : «Ton cadeau est
une offense! Je t'ai envoyé un présent d'une valeur inestimable, et toi, tu
me fais porter une babiole insignifiante!» Rabbi Yéhouda lui expliqua alors : «La perle que tu
m'as envoyée est si précieuse que je dois la mettre sous bonne garde. Mais le
cadeau que je t'ai offert, au contraire, te protège constamment, même
pendant ton sommeil!» Le Talmud nous raconte qu'un personnage important de
l'Empire Romain, Onkélos, fils de Kalonimos, s'était converti au judaïsme.
Cela avait tant soulevé la colère de César qu'il lui envoya une troupe de
soldats chargés de le «ramener à la raison». Mais Onkélos parvint à les
persuader de se convertir à leur tour. César décida d'envoyer un autre
groupe. Mais il les mit soigneusement en garde, leur ordonnant de refuser toute
discussion avec Onkélos. Les soldats arrêtèrent ce dernier et voulurent
l'amener à César. Mais, Onkélos, à la porte de sa maison, mit la
main sur la Mézouza et sourit. Les soldats demandèrent une explication.
Onkélos leur dit : «Habituellement, les rois restent
au fond de leur palais et leurs serviteurs doivent, au-dehors, monter la
garde. Mais notre Roi, le Roi de l'univers, laisse Ses serviteurs dans leur
maison et c'est Lui Qui veille à l'extérieur» |
JANUS DIEU
ROMAIN |
ARCADIA |
2010 |
|
Janus est un dieu exclusivement romain, protecteur de la
ville de Rome. Il est souvent associé à Vesta (déesse des foyers) et Saturne
(Chronos dans la mythologie grecque). Origines : Les origines de
Janus sont troubles : différents auteurs se disputent l’endroit de sa
naissance et son statut véritable, de prince grec à demi-dieu, mais il est
certain qu’il venait de Grèce, et qu’il n’était pas un dieu du panthéon grec.
Il prépara une flotte, se rendit en péninsule italique, alors occupée par
différents peuples, et conquit entre autres le Latium (où vivaient les
Latins, futurs Romains). Il y fonda la ville de Janicule. Lorsque Saturne fut
déchu et que son fils Jupiter prit la tête du panthéon romain, il chercha
refuge et le roi Janus l’accueillit avec hospitalité. Ils s’associèrent pour
régner sur le Latium, apportant prospérité et richesse au pays. En mémoire de
cet Age d’Or, on fêta longtemps les Saturnales, trois jours de Décembre où
tous étaient égaux, sans rang d’esclave ou de maître, dans l’abondance. Je n’ai trouvé aucune information
sur comment il est devenu un dieu, mais je manque de sources sûres. Toujours
est-il qu’à l’époque romaine, il était devenu un dieu puissant, de premier
ordre dans la mythologie romaine, à l’égal de Saturne et de ses fils. L’étymologie
la plus courante de Janus vient du latin ianua
(portes) et ianitor (portier). Les deux visages : En
remerciement de son hospitalité, Saturne offrit à Janus un don précieux :
celui de voir le passé comme l’avenir. C’est pour cela qu’il est représenté
avec deux têtes regardant dans deux directions opposées. On l’appelle alors
Janus bifrons (deux têtes, en latin). L’une de ces têtes
était barbue et l’autre imberbe, représentant la dualité Soleil-Lune. Mais,
avec le temps, les deux têtes devinrent barbues. Les devins qui en référaient
à ce dieu, les janides, pouvaient lire l’avenir dans les
entrailles d’animaux sacrificiels. Il est également le dieu des
portes et des fenêtres, qui s’ouvrent à la fois sur l’intérieur et sur
l’extérieur, qui s’ouvrent et qui se ferment, et correspondent donc
parfaitement à la dualité de Janus. En cela, il est avec les Heures le
gardien des Portes Célestes, ses deux visages lui permettant de surveiller
l’ensemble de l’univers sans bouger. D’ailleurs, à Rome, son temple principal
avait la particularité d’ouvrir ou de fermer ses portes selon que Rome était
en guerre ou non : en temps de guerre, ses prêtres ouvraient les portes pour
signifier que Janus était parti au combat pour protéger son peuple, et en
temps de paix, les portes étaient fermées, parce que le dieu était de retour
chez lui. Par extension, il devint donc le dieu protecteur de la ville et un
des dieux de la paix. Janus quadrifrons : Plus
tard, Janus fut parfois représenté avec quatre visages. Il était alors la
représentation des quatre saisons, et donc du cycle de l’année, présent à son
commencement et à sa fin. Par extension, il devint le dieu des commencements
: il préside encore aujourd’hui au début de l’année, puisque Janvier porte
son nom. Il présidait à chaque début temporel : premier mois de l’année,
premier jour de chaque mois, première heure de chaque jour, et bien sûr le
début de la vie ; il était souvent le dieu appelé en premier lors des
cérémonies, même celles concernant d’autres dieux, plus importants ou non. Représentations et interprétations de Janus : Protecteur
de Rome, Janus était présent un peu partout dans la ville. En plus du temple
principal qui lui était consacré (celui aux portes qui s’ouvrent en temps de
guerre), on avait consacré, au-delà de la porte du Janicule, douze temples à
Janus, un pour chaque mois de l’année. On trouve aussi certains temples
consacrés spécifiquement à Janus quadrifrons, comme la
célèbre Arche, à Rome.
Dans le domaine littéraire,
Ovide a consacré le premier livre des Fastes, qui correspond au
mois de Janvier, à ce dieu. Il y identifie Janus comme étant le Chaos
originel des grecs. Lorsque ce chaos se sépara pour former les quatre
éléments primitifs (terre, air, eau, feu), il en émergea un dieu, Janus, dont
le double visage est la seule trace de la confusion qui régnait jusqu’alors.
Janus est un dieu pacifique,
généralement classé hors du panthéon romain (c’est un dieu local et non
cosmogonique), mais puissant et protecteur. Sa fonction de portier et de dieu
des commencements en font un dieu essentiel de toute cérémonie, à commencer
par celle qui ouvre l’année. C’est cet aspect du dieu qu’on retient le plus
souvent, contrairement à sa capacité de voir le passé comme l’avenir. Mais
dans tous les cas, il est lié au passage, du temps comme de l’espace.
Le nom de Janus est assimilable à un nom commun
signifiant « passage ». L'irlandais a dérivé de la même racine le
mot désignant le « gué » et la porte d'une maison se dit en latin janua ;
inutile sans doute de recourir au dieu étrusque Ani pour expliquer le Janus
latin. Il est le dieu qui préside à toute espèce de transition d'un état à un
autre. Dans l'espace d'abord : il veille sur le seuil de la maison,
protégeant le passage de l'intérieur à l'extérieur et inversement ; il
préside au passage de la paix à la guerre et inversement, c'est-à-dire au
départ de l'armée pour l'espace extérieur à la ville et à son retour vers
l'espace intérieur de la même ville ; il assure enfin le passage du monde
des hommes à celui des dieux et, à ce titre, est toujours invoqué au début de
toute prière rituelle.
Dans le temps ensuite : il est le dieu du
matin ; on l'honore le premier jour du mois, aux calendes, et il a donné
son nom au mois qui devait devenir le premier de l'année, januarius
(janvier). Il préside de même au passage à l'histoire, comme premier roi
légendaire du Latium, ce qui a justifié son assimilation au Chaos des Grecs.
Sa représentation iconographique traditionnelle résume ces deux
aspects : les deux visages de la statue évoquent le présent comme
transition du passé au futur et il est paré des emblèmes du portier, le bâton
et la clé. Dans l'être enfin : il veille sur la naissance comme passage
du néant à la vie. En fait, si la notion de passage reste partout sensible,
elle se confond parfois avec celle de commencement, en particulier à
l'occasion de la naissance et des calendes ; d'où des interférences avec
d'autres divinités, Junon entre autres.
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«
LE RAPPEL DE
SOI » |
ARCADIA |
2014 |
|
Souvenez-vous ce que
disent les maitres soufi … Le
plus grave dans la vie est de s'oublier de soi-même. Donc il est nécessaire
de transformer les impressions, et ceci est seulement possible en interposant
l’Être entre les différentes vibrations du monde extérieur et le mental.
Quand on interpose entre les impressions et le mental ce que nous appelons la
Conscience, il est évident que les impressions se transforment en des Forces
et des Pouvoirs d'Ordre Supérieur. Il
est très facile d'interposer la Conscience entre les impressions et le
mental. Pour recevoir les impressions avec la Conscience, et non avec le
mental, on a besoin seulement de ne pas s'oublier de nous-mêmes à un moment
donné (…) Nous devons être concentrés sur l'Être, pour que soit l’Être, la
Conscience Superlative de l'Être, celle qui reçoit les impressions et qui les
digère correctement. On évite ainsi les réactions horripilantes que tous, les
uns et les autres, avons devant les impacts provenant du monde extérieur. On
transforme ainsi complètement les impressions, et transformées, elles nous
développent merveilleusement. Parce
que si on s'oublie de son propre Être Intérieur en présence d'un insulteur,
on termine en l’insultant ; si on s'oublie de soi-même, de son propre Être,
en présence d'un verre de vin, on finit en ivrogne ; si on s'oublie de
soi-même, de son Être propre en présence d'une personne du sexe opposé, on
finit en fornicateur. Quand
on apprend à vivre en état d’Alerte Perception, d’Alerte Nouveauté, quand on
se rappelle à soi-même d’instant en instant, (…), quand on ne s'oublie jamais
de soi-même, il est indubitable que nous devenons conscients. Au moment d’une
tentation rigoureuse, d’un découragement et d'une peine, on doit avoir
recours au rappel intime de soi-même. Quand
soi-même, on se donne le choc du "Rappel de Soi", un changement
miraculeux se produit réellement dans tout le travail du corps, de sorte que les
cellules reçoivent un aliment différent. Dans le fond de chacun nous, la
Tonantzin aztèque, la Stella Maris, l'Isis égyptienne, Déesse Mère, nous
attend pour guérir notre coeur endolori. Aucun
homme n'est un véritable croyant, à moins qu'il ne désire pour son frère
autant qu'il désire pour lui-même. Dieu ne donnera pas son affection à cet
homme qui ne donne pas la sienne propre à ses créatures. Le préféré de Dieu
est celui qui fait le bien à Ses créatures. Le meilleur parmi les hommes,
c'est celui qui augmente le bien de l'humanité. Toutes les créatures de Dieu
sont sa famille. Le plus aimé par Dieu est celui qui essaie de faire un bien
plus grand à Ses créatures. Il nourrit l’affamé, visite le malade et libère
le captif quand injustement il a été emprisonné. Il aide toute personne
opprimée, qu'elle que soit sa religion, son origine.... Il aime avant tout
son prochain. Tout
homme peut atteindre la libération au moyen de sa foi et de ses bonnes
actions (…) Annihilez votre ego. Servez l'humanité souffrante. Sacrifiez
votre argent, votre temps et votre énergie au service des pauvres et des
opprimés. Ceci en effet vous fournira le salut ou la liberté. Dans la vocation missionnaire, il y a du
sacrifice, et que “si nous ne faisions
rien pour porter la lumière de la connaissance à d'autres gens, à d’autres
peuples et à d’autres langues, nous tomberions dans un égoïsme spirituel,
très raffiné, qui nous empêcherait toute avance intérieure”. Aimer sans
demander rien en échange, éliminer la rancœur, pardonner droitement les
défauts d'autrui, donner sa vie pour le prochain, tout véritable sacrifice
est récompensé par Dieu. |
RḖFLEXION SUR LE PETIT PRINCE ET L’INITIATION PAR LE CONTE |
Walter Boralis |
2005 |
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Conte
initiatique et humaniste, qui interroge notre être profond et notre
civilisation. Texte littéraire reconnu dans le monde entier comme un joli
conte pour enfant, il est aussi porteur d’une critique forte et engagée de
l’homme contemporain et du monde qui l’entoure. Il réaffirme la nécessité de
solidarité, d’amour, d’ouverture à l’autre. C’est aussi une invitation
d’Antoine de Saint-Exupéry à retrouver l’enfant en soi, conte philosophique
tout en tendresse et poésie. Le roi, le vaniteux, le buveur, le businessman,
l’allumeur de réverbère, le géographe, le serpent, l’écho, le renard etc…
tous seront sur la route du Petit Prince, petit bonhomme à l’écharpe dorée,
au regard candide, neuf. Le
Petit Prince est sans aucun doute un des plus beaux plaidoyers jamais écrits
contre le nihilisme et pour le réenchantement de la vie. C'est un
chef-d'œuvre, une consolation, un puits dans le désert du monde, une
promesse... " Lorsqu’en
1942 Curtice Hitchcock, l’éditeur américain de Saint-Exupéry, lui demande de
rédiger un « conte de Noël », il cherche à exploiter sa notoriété immense aux
États-Unis pour réaliser une opération commerciale. Saint-Exupéry s’attelle à
la tâche, mais, préoccupé par d’autres questions d’ordre existentiel, il va
alors faire évoluer l’idée initiale vers un projet autrement plus ambitieux :
Le Petit Prince dépasse le cadre du conte pour devenir un mythe. La
reprise de la structure du conte philosophique : Le Petit Prince reprend le schéma du conte philosophique tel
que Voltaire a pu l’inventer, avec « Candide » ou « Micromégas » par exemple
: comment ne pas voir en effet dans le voyage intersidéral du petit prince
une réécriture de la visite de la terre par un extraterrestre venu d’une
planète proche de l’étoile Sirius, conte qui s’inspirait lui-même de la mode
des voyages extraordinaires ? Les visites successives des six planètes
puis de la terre par le petit prince, où chaque planète constitue une étape
dans la formation du petit prince, donne ainsi au récit une dimension
clairement initiatique qui l’enracine dans le genre du conte
philosophique. La
reprise des codes du conte philosophique : Mais surtout Le Petit Prince s’inscrit dans la dimension
satirique propre au conte philosophique. En effet, Saint-Exupéry reprend
également la technique du regard étranger, inaugurée par Montesquieu dans ses
Lettres persanes, où le regard perçant des Persans rend soudain visible les
bizarreries du mode de vie français que les Français, anesthésiés par
l’habitude, n’arrivent plus à déceler : le regard étranger par sa naïveté
feinte porte une critique de la société et Voltaire exploitera ce procédé du
regard candide et ingénu dans… Candide et L’ingénu. Le point de vue naïf
et innocent, typique du regard enfantin que porte le petit prince, se
manifeste dans la conclusion de la visite de chaque planète : « Les grandes
personnes sont décidément très bizarres » et permet de dénoncer aussi bien le
comportement du roi que du vaniteux, du buveur, du businessman ou du
géographe – personnages croqués qui ne sont pas sans rappeler les portraits
de La Bruyère dans Les caractères (d’où leur absence de nom). Une parodie de conte philosophique : Saint-Exupéry dépasse cependant le simple
cadre du conte philosophique et le réécrit parfois de façon parodique : « [Un
astronome turc] avait fait alors une grande démonstration de sa découverte à
un congrès international d’astronomie. Mais personne ne l’avait cru à cause
de son costume. Les grandes personnes sont comme ça. Heureusement, pour la
réputation de l’astéroïde B 612, un dictateur turc imposa à son peuple, sous
peine de mort, de s’habiller à l’européenne. L’astronome refit sa
démonstration en 1920, dans un habit très élégant. Et cette fois-ci tout le
monde fut de son avis ». Cet épisode constitue une réécriture du célèbre «
Comment peut-on être Persan ? » de Montesquieu, mais sur un mode dégradé :
peut-être peut-on voir Mustapha Kemal Attatürk dans la figure du dictateur
turc mais c’est surtout l’antiphrase “ heureusement ” qui donne tout son caractère
ironique à ce passage… Un conte à la frontière du mythe : Mais à partir de la rencontre avec le renard
le texte change de dimension et quitte le conte pour entrer dans le mythe. Le
petit prince ne rencontre plus des personnages humains mais des animaux
symboliques (le renard et le serpent), qui vont lui dévoiler des vérités
éternelles – à la différence du conte où le parcours initiatique dévoile des
vérités personnelles sur le héros : « l’essentiel est invisible pour les yeux
» (qui reprend la théorie de Platon sur le monde des Idées qu’illustre
l’éléphant caché dans le boa) et « on ne voit bien qu’avec le cœur » (qui
reprend la distinction de Pascal sur les vérités sensibles au cœur,
c’est-à-dire à l’intuition, par opposition aux vérités que l’on peut
atteindre par la déduction et la raison). Paradoxalement, c’est ce petit livre, tant décrié à sa
parution en 1943 et que l’on taxa de futilité en temps de guerre, qui assure
aujourd’hui la notoriété de l’auteur ; peut-être parce que – plutôt que de
chercher à être immédiatement utile – il s’est intéressé à ce que l’amitié,
l’amour et la mort peuvent avoir d’universel. Évidemment Saint-Exupéry a
bien choisi les titres de ses livres ! ... "Vol de nuit", "Courrier sud"... Les mots
et les images évoqués ainsi concourent tous à exprimer cette direction unique
et essentielle de son message, la ligne de force de toute son œuvre : la
découverte, le maintien conscient et le partage du Mouvement bien ordonné... Quel message intégral, rappelant le symbole du "Serpent
Ouroboros" de l'alchimie! Ne pouvons-nous pas résumer ainsi : la ligne
de force de son œuvre, c'est le rappel des Lignes de Forces de la Vie...Le
voici déjà, lui qui, pionnier de l'aéronautique ouvre des terrains et des
lignes d'aviation, de l'aéropostal "la ligne" et autres itinéraires
aériens à travers le monde..., comme si ses conceptions, ses intimes pulsions
de vie s'incarnaient ainsi dans la matière. Préoccupation naturelle se
"somatisant" pourrait-on dire, en occupation contraire: un couple intérieur-extérieur
si souvent antagoniste chez les êtres qui n'ont pas su, ou accepté de, relier
déjà leur cœur et leur tête... et dont le métier est douloureusement sans
rapport avec leur idéal et leurs souhaits ! Saint-Exupéry a constaté cette nécessité d'incarnation; il
l'explique très nettement ainsi : "Tu ne trouveras point la paix si
tu ne te fais véhicule, voie et charroi". Mouvement vers... la
"Terre des Hommes"; vers la découverte, le maintien conscient et le
partage d'"un sens à la vie", comme ses autres ouvrages nous
le font de nouveau découvrir par leurs titres. Mais attention! "Vol de Nuit", "Pilote de
Guerre": tant de difficultés dans ce cheminement obscur et violent de
l'existence! Il faudra prendre ses distances, voir les choses "d'en haut"
: Le cheminement devient alors épreuve initiatique, Cheminement initiatique;
dans le cas contraire le résultat est terrible : "myope et le nez
contre, je n'ai rien vu jamais que lâcheté, sottise et lucre. Mais de la
montagne où je m'assieds, voici que j’aperçois l'ascension d'un
temple dans la lumière". Ayant pris ses distances vis-à-vis des relativités terrestres,
grâce à son avion comme par l'intermédiaire du désert, Saint-Exupéry, comme
tous les guides dignes de ce nom, les "voyants", les connaissant de
quoi que ce soit, a "vu quelquefois ce que l'homme cru
voir" (Rimbaud); il peut le révéler pour ses lecteurs, pour ses
"amis" au sens phonétiquement cabalistique du mot, pour ceux dont
l'âme est déjà proche de la sienne... Qui n'a jamais connu, au lycée ou dans "les chemins de
grand vagabondage", une telle rencontre, un tel lien intellectuel et
affectif, de "cœur", avec un auteur qui expose pour lui les lignes
de force de l'existence, est fort à plaindre! Qui n'a jamais perçu ainsi,
comme Dante: Béatrice et Virgile, comme tant de troubadours: la
"Dame" comme tant d'autres : des "stars"- modèles,
"une étoile pour guider sa marche", aura beaucoup à peiner, à se
fourvoyer pour redécouvrir, solitaire, "ce champ de force qui seul l'anime",
qui est " direction et tendance vers". "tout le monde n'a pas
eu un ami" constate Saint-Exupéry dans le "Petit Prince". Lui, tout comme il lançait des lignes à travers le désert pour
transporter les messages des hommes (l'Aéropostale), le voici qui lance, dans
tous ses ouvrages, ces "lignes de force", ces
"structures" essentielles pour aider dans la traversée d'un désert
tant intérieur ("On ne voit rien. On entend rien" (P.P) "le
désert c'est moi" (Terre des Hommes) qu'extérieur ("à mille milles de
toute terre habitée"... "Où sont les hommes" (P.P). C'est bien
là ce que tente de faire tout ouvrage initiatique, toute voie initiatique,
diamétralement opposée en cela aux romans "à l'eau de rose", aux
récits de cas psychanalytiques et autres ouvrages ("créations" ou
conseils ) concluant à la faiblesse inhérente à l'être humain ou à l'ineptie,
à l'absurdité de l'existence ; à l'aliénation (alien?)... Saint-Exupéry affirme bien clairement, lui l'existence de
liens : "Comptent pour l'homme d'abord et avant tout la tension des
lignes de force dans lesquelles il trempe". Pas les impulsions des
désirs personnels! Les pulsions sous-tendant celles-ci : il ne s'agit pas
"de cultiver tes désirs. Car si rien ne s'y meut, il n'est point de
lignes de force"... Ainsi, comprenons-le bien, pas de mouvements vers "le
repos du 7ème jour", les "diamants en vrac", "les femmes
(qui) se vendent", "l'île heureuse" qui rendraient l'être
semblable au "bétail morne"... Non! Le mouvement est en direction
des hauteurs de soi-même, de l'origine de soi-même (sens véritable
d'"initiation"), vers la "connaissance du nœud divin qui
noue les choses", vers le Maître du champ des forces, ce point
mystérieux que Saint-Exupéry nomme tout-à-tour "Seigneur",
"Dieu", "Eau, Désert", etc... Il s'explique plus catégoriquement à ce sujet : "Les
lignes de force créées doivent te dominer de plus haut pour que tu y trouves
tes pentes et tes tensions et tes démarches (...) et (pour te) rassembler à
quelque chose qu'il n'est point de toi de comprendre". Heureux ceux
qui le réalisent et vivent ainsi! Les autres sont en "exil" - et
Saint-Exupéry, exilé en Angleterre, incompris de ses amis, calomnié par
d'autres sait de quoi il parle! La terre est alors pour eux, comme pour le
Petit Prince, un véritable désert... "les grandes personnes (elles),
s'imaginent tenir beaucoup de place" (P.P); mais celui qui n'est ni
mégalomane, comme le roi rencontré par le Petit Prince, ni un vaniteux
schizoïde, ni un drogué s'auto-justifiant toujours, ni un "responsable"
de futilités, ni un obsédé de travaux inutiles, ni un... "mouton",
sera bien vite amené à "ne voir personne" (P.P passim) sur la
terre...Il ne rencontrera que ce qu'il cherche véritablement, même si
inconsciemment: un sage renard pour le guider, un Petit Prince qui
"réveille" ou un Aviateur en quête, comme lui, de cet "essentiel
(...) invisible pour les yeux" (P.P); le Maître n'arrive-t-il pas,
comme le révèlent aussi bien le Bouddhisme que la théorie des champs
morphogénétiques, lorsque l'élève est prêt ? Les "lignes de force" qui sous-tendent l'existence
ne sont-elles pas toujours présentes, actives et utilisables pour l'être qui
ne s'enfourne pas, pour les éviter ou les contrer, dans les
"trains" où il va "bailler", "dormir", pour
l'être qui ne cherche pas à faire "des économies de temps" ? (P.P).
Et ne sont-elles pas données à l'être dès sa naissance? Les familiers du
"Petit Prince" ou des héros de " l'Oiseau Bleu" de
Maeterlinck iront plus loin dans ce constat: ils réaliseront vraiment que
l'on puisse "profiter d'une migration d'oiseaux sauvages", de
lignes de forces naturelles pour changer de planète! Ce sont de solides champs de forces que révèlent toutes les
aventures- devenant ainsi épreuves-aides "initiatiques" - relatées
par l'auteur, " des lignes de force dans lesquelles il trempe" lui,
comme tous les êtres humains ou les animaux... Leur solidité de base, leur
inné consciemment perçu! Voilà bien alors pourquoi le Pilote de ligne
s'exclame : "J'ai toujours connu comme tristes les émigrés"...
Aujourd'hui, ajoute-t-il, "les hommes manquent de racines"
(P.P) car ils les ont quittées pour les "remous contradictoires"
de leurs "pentes naturelles", c'est-à-dire de leurs désirs
égotiques de leurs "fausses structures (qu'ils) inventent par
jeu"..."Ils ont tout désaimanté" (Et le mot, ambigu
dans son double-entendement, maintenu par la langue des Oiseaux sacrée, est
fort parlant) "en défaisant ce nœud divin qui noue les choses". Les retrouver, les maintenir, ces coutumes, ces traditions,
ces fêtes, ces lois et ce langage de l'"empire" c'est sauver
la "citadelle", la "demeure" et ses
habitants "des projets de sable", de "l'effritement
des choses", de l'existence ou l'on vit "seul, sans personne
avec qui véritablement parler" et "tellement triste" "Je t'ai dit qu'il fallait des
objets reliés", lance Saint-Exupéry... Reliés avec le passé... liens, par là, avec ce que
Saint-Exupéry nomme "Dieu", "Rose", "Renard",
"Petit Prince", c'est-à-dire lien avec un état édénique que l'on a
connu imagé par des êtres, des choses, des mots "imagerie",
"symboles", "concepts", qui rappellent, comme "le
blé qui est doré" fera "souvenir (...) des cheveux couleur
d'or" du Petit Prince et ("Ce sera merveilleux" !) de lui, par
conséquent, de son amitié... L'existence est ainsi ritualisée... et Saint-Exupéry est
formel : "il faut des rites. un rite c'est quelque chose de trop
oublié". C'est un cérémonial "à la façon d'un conte de fées
pour ceux qui comprennent la vie", ou, comme tous les "livres de
l'enfance, (...) notant tout le long les prières, les concepts charriés par
cette imagerie" réitération de légendes au sens étymologique de
"liens", une ligne de force qui "charrie" partout et
toujours des "vérités" symboliques", des " concepts strictement
religieux" (étymologiquement encore : qui relient !), " l'amour,
les trésors invisibles, le sacrifice, l'universel". Nous trouvons ainsi : le Puits du Village, le Désert, le
Serpent, le Baobab, la Rose, le Volcan, le Petit Prince, l'Avion, les
Etoiles, la Maison, l'Eau, dans "le petit prince" et, ailleurs, la
Sentinelle, la Jeune Femme criminelle, le Père, les Courtisanes, la Panne, le
Berger, le Forgeron...Tous sont, dans le cheminement initiatique,
"souvenirs d'étapes et d'efforts et de sacrifices", objets qui
rayonnent, comme le "puits dans le désert" d'une "invisible
(...) beauté", de cet "essentiel (...) invisible pour les
yeux" mais qui touche "le cœur", "embellit",
chante, révèle en fin de compte " le nœud" entre les choses. Il y a
en effet, conclut Saint-Exupéry, "ta présence au travers qui me
permet d'y déchiffrer" une construction future, car "les
objets sont vides et morts s'ils ne sont point d'un royaume spirituel". Ainsi, on l'aura compris par ces exemples, "les rites
sont dans le temps ce que la demeure est dans l'espace" : des images
éternelles qui, comme des fils invisibles, me relient éternellement à ma "vérité
(qui) se creuse comme un puits", à ce qui "rassemble",
à la "semence" qui fait espérer les moissons et "se
réjouir de la croissance des moissons", aux "assises de la
citadelle", à cette Terre que "la corde du puits
accouche" et qui "redonne le goût des victoires".. On demeure ainsi, par ces vecteurs, ces lignes de force entre
la réalité profonde originelle et le présent, dans l'intimité et la
plénitude, chez soi, dans la sérénité, dans la conscience cependant de
la nécessité de maintenir et cette connaissance, et le processus de
création pour les générations futures. Oui! "tout s'ouvre sur plus
vaste que soi" : "la manivelle rouillée est cantique",
"un puits porte loin... comme l'amour" (Terre des Hommes),
et tout objet ainsi re-sacralisé, relié par cette conscience des Rites fera
le même. Mais ce sont là, bien entendu, des liens ainsi et aussi entre
les hommes : liens entre le Pilote et le Petit Prince, entre le Petit Prince
et le serpent ou le Renard (très humanisés !), entre Saint-Exupéry et ses
lecteurs à qui il s'adresse personnellement, les priant de lui écrire...C'est
ce qu'il veut établir car si les hommes "ne savent plus ce qu'ils
cherchent", lui, Saint-Exupéry, sait que ce qu'ils cherchent "pourrait
se trouver dans un peu d'eau ou dans une rose" : "soyez
mes amis", crie le Petit Prince ! "Créez des liens"
conseille le Renard, car "il n'existe point de marchands d'amis, les
hommes n'ont plus d'amis" (P.P)! Il faut donc apprendre à
"apprivoiser" : "cela signifie créer des liens"... mais
cela peut-il se faire avec des "gens sérieux" qui ne parlent que de
"bridge, de golfe, de politique et de cravates"? Non! Il faut "organiser", "opposer son arbitraire
à cet effritement des choses et n'écouter point ceux qui parlent des pentes
naturelles" : " je les sollicite de m'aider"
conclut Saint-Exupéry, comme le renard avait prié le Petit Prince de suivre
le rituel de l'approche, des horaires..."Seuls sont frères les hommes
qui collaborent" explique Saint-Exupéry ; aussi va-t-il inventer "un
empire ou tout soit fervent", soutendu par les forces vives des
êtres humains qui doivent s'en ressentir "dominés". Il les
invite à la soumission, ainsi, à leurs intimes moteurs; non à la passivité! "les
sédentaires de cœur (...) qui n'échangent rien ne deviennent rien"
affirme-t-il, tout comme Nietzsche ("tout n'est que passages que Dieu
emprunte") ou Teilhard de Chardin, un de ses auteurs favoris ("arrière
les immobilistes! La vie n'est que perpétuelle découverte"!)... Éternel message des enseignements initiatiques : Yin et Yang
de l'androgynat, Détachement et "extinction de l'extinction": "Il
faut se soumettre pour survivre" mais "il faut lutter pour continuer
de vivre». Nous le constatons, si nous résumons ainsi son œuvre par cette
phrase synthétique, Saint-Exupéry prône en fait le seul : LIEN AVEC SOI...Lien avec ses racines, car l'être "vaut, dans le désert,
ce que valent (ses) divinités" Lien avec son monde extérieur auquel il
confie des images utiles ("s'ils voyagent un jour ca pourra leur
servir") (P.P) des mots d'ordre "urgents" "pour
avertir ses amis d'un danger qu'ils frôlaient depuis longtemps sans le
connaître", des conseils ("Ne vous pressez pas, attendez un
peu sous l'étoile"), de justes catalyseurs ("ma maison
cachait un secret au fond de son coeur") (P.P).Voilà bien une
nourriture vitale sous forme d'aliments des sens physiques, émotionnels et
mental pour qu'elle "se fasse aliment pour le coeur") (P.P).
Lien avec le monde intérieur, avec ce "cœur" pour qui l'eau trouvée
dans le désert, la Source de la Vie, est bonne; avec ce cœur pour qui cette
"eau-là" doit être cherchée (P.P), cette eau merveilleuse, cette
"bonne eau" de Byron, transfigurée par le don ("la différence
réside dans le don (...) acte de baigner de son amour") : dans le lien
d'amour au-delà des formes, cet "amour exprimé", seulement là...
Car " quel serait ton bonheur si tu n’avais pas ceux que tu éclaires?
", questionne Nietzsche ; l'essentiel du cierge n'est point la cire qui
laisse des traces mais la lumière" explique Saint-Exupéry. LIEN AVEC L'ESSENTIEL... "Quiconque demeure logique tue en lui la vie"... et c'est pourquoi Saint-Exupéry nous
avertit que ce lien d'Amour est "mystérieux" : il relie à l'unité
ontologique de tout, dans la source initiale où l'Initiation est censée faire
pénétrer; il est ligne de force entre l'homme et le terre-Mère ("Celui
qui épouse le puits épouse la terre" ), entre la terre et
"dieu" ("la marche vers Dieu"), Dieu étant dit
également "Citadelle, Épanouissement, Mystérieux Rayonnement", le
nœud divin qui noue les choses, le Centre des "liens avec le monde"
: "je te conduirais à l'épanouissement de toi-même" à
la "drôle de petite voix qui réveille et qui sait" (P.P)
écrit l'auteur...Évidemment ce nœud octroie la toute conscience et la toute
connaissance : Comment le Petit Prince connaîtrait-il autrement l'existence
des moutons, absents de sa planète? Comment devinerait-il que la panne est
réparée ("Comment sais-tu?" questionne le pilote) ou que
l'heure de quitter la terre est arrivée? "On ne voit bien qu'avec les
yeux du cœur" : mais ce "Cœur", Saint-Exupéry ne cesse de
la rappeler, n'est pas le cœur des désirs! En cette source même la faim et la
soif n'existent pas : le Pilote le remarque bien au sujet du Petit prince
qui, de plus, " ne mesure pas le danger" et ne craint pas la mort. Ainsi tout le cheminement de l'existence, consciemment vécu,
donc en état de "bonheur" ("démarche d'obtenir") se perçoit
comme une remontée par des filières, des lignes de force, des images, des
symboles, des héros reliés entre eux par des mythes, des légendes, vers
l'ouverture "sur plus vaste que soi", sur la délivrance qui
permet la seule vraie création. Ces lignes, ces fils lumineux, ces
"émanations" Don Juan les a évoqués pour Castaneda au cours du
cheminement initiatique de ce dernier; n'est-ce pas une image similaire que
le Christ, à ce que rapportent les Évangiles, utilise pour envoyer ses
disciples pêcher les âmes? "Les Noces Chymiques" de Christian
Rosencreutz ne parlent-elles pas de même d'une pêche à l'homme au moyen d'une
corde lancée du sommet de la grotte où il attend ?... Saint-Exupéry, en révélant aussi vigoureusement leur présence,
réveille et révèle leur souvenir dans la pensée du lecteur, leur présence au
coeur des choses les plus anodines ou dégénérées. En leur exposant les lignes
de force dont sont issues les "pierres avec lesquelles ils bâtissent la
haine", peut-être s'en serviront ils pour "bâtir l'amour",
pour suivre les souhaits réels, les pulsions non égocentriques et non les
impulsions individuelles; au-delà, donc, "des biens en grand nombre (où)
il est offert aux hommes plus de chances de se tromper sur la nature de leurs
joies" ? Car "il ne s'agit point de nous; nous sommes ensemble
passage pour Dieu qui emprunte un instant notre génération et l'use"...Ils
atteindront alors à la "perfection de l'état de l'homme", à cette
créativité de la Nature naturante en eux; de même, "le cèdre se
nourrit de la boue du sol, mais la change en épais feuillage qui se nourrit,
lui de soleil"... Ainsi replacé en sa juste filière originelle, "l'orgueil
(des hommes) devient tour et temple et rempart" de la "citadelle";
"leur cruauté devient grandeur et rigueur dans sa discipline. Et voilà
qu'ils servent une ville née d'eux-mêmes et contre laquelle ils se sont
échangés dans leur cœur". La Voie initiatique, c'est donc faire
"germer et croître" l'être humain, mais lui accorder, de plus, la
conscience de son action: telle est la plénitude à laquelle l'homme peut
atteindre si un maître du désert peut le nouer à ces lignes de vie,
l'apprivoiser, le faire "collaborer" ("tous à travers tous
et à travers chacun" à l'"œuvre" et le rendre "responsable d'un
empire qui n'est pas des choses mais du sens des choses L'appel de ce maître : " Je suis la clé
de voûte d'un certain goût des choses et je te noue. Et s'en est
fini de ta solitude". C'en est fini alors du "Mozart
assassiné", de la "belle promesse de la vie" en l'homme "marquée
par la machine à emboutir de la civilisation"... C'en est fini alors "des
fourmis pour la vie de la fourmilière", des feux "sans
emploi ni règle" (toujours prêts à éclater comme des volcans
longtemps réprimés). "Bien ramonés de leurs connaissances mortes",
de leur ironie de cancre", de leurs liens avec les biens matériels, de
leur mensonge et délation, de leur racornissement hors échange, les êtres
humains brûlent doucement et régulièrement, sans éruptions"... "grand
miracle de la mue et du changement de soi-même". Ultime épreuve du
Cheminement initiatique, si l'expression "soi-même" est justement
comprise, non comme entité profonde mais comme entité globale! Ultime épreuve
à laquelle Saint-Exupéry nous convie par chacune de ses lignes dont nous avons
tenté de dégager, en quelques lignes, les grandes lignes! De là, tout
commence alors de la vraie Vie où "tous les pas ont un sens" et
qui se synthétise ainsi : "je protège celui qui de son aïeul le
chanteur hérite le poème anonyme et, le redisant à son tour, y ajoute son
suc, son usure, sa marque. Car je suis d'abord celui qui habite (...) et les
sollicite (tous ses semblables) de m'aider"... Cheminement initiatique, pour Saint-Exupéry comme pour son
lecteur, à travers les lignes qui sous-tendent et rassemblent les
images-clefs de tout quotidien; lignes de parcours "aérien" pour
lui comme pour le lecteur; seulement en densités différentes pour l'un et
pour l'autre, suivant le degré d'incarnation ou de simple constat
intellectuel de chacun... Voie opérative ou spéculative de l'Alchimie...
Préhension ou compréhension pour la future conjonction des deux;
respectivement volatilisation du fixe (solve) ou fixation du volatil
(coagula)... réseau de lignes d'aviation ou immense réseau international de
tous les passionnés, de tous ceux qui offrent à leurs amis leur livre de
chevet, ce "Petit Prince" l'un des ouvrages les plus traduits au
monde... Nous le percevons bien: toute l'œuvre de Saint-Exupéry est
ésotérique, c'est-à-dire qu'elle contient non un enseignement
"caché" mais l'Enseignement de ce qui est caché sous les formes de
la nature. Enseignement, donc, initiatique, c'est-à-dire aidant à la
découverte, sous ces formes, de "l'essentiel invisible pour les
yeux", de l'importance des choses au-delà de leurs beautés
"vides", ce que les aveugles, les "sans-cœur" nient, ne
l'ayant point perçu et qui, par conséquent, n'est pas un enseignement
généralisé..."C'est pourquoi tu ne sauras point, si nul ne descend
vers toi de sa montagne et ne t'éclaire, quelle route à suivre te sauvera. De
même que tu ne croiras point aussi savamment que l'on te raisonne, quel homme
naîtra de toi ou s'y éveillera puisqu'il n'y est point encore. C'est pourquoi
ma contrainte est puissance de l'arbre et par elle, libération de la rocaille"... En cette fin de XXème siècle, beaucoup préfèrent suivre la
pente de leurs désirs personnels, refusant "le chef, le maître, le
responsable" : et cela se comprend! Les jeunes, notamment éprouvent une
immense soif de liberté individuelle, traumatisés, castrés, ou voyant les
autres l'être, par de fausses structures" dont "faible et pitoyable
est la joie que l'on tire, par la machine à emboutir...Observons : à ceux qui
posent des questions sur les "énigmes", la réponse des
"marchands de pilules perfectionnées", des "gens
sérieux", des gens qui se disent "qualifiés", n'est jamais : "Tu
deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé", "On
ne voit bien qu'avec le cœur", "les enfants seuls savent ce
qu'ils cherchent" Non! Avec "opportunisme", créateurs de "faux
litiges", de clans, de sectes, de partis, et de factions, comme des
chiens qui tournent autour de l'auge" qu'ils convoitent, car
"n'ayant point encore compris, ils s'indignent ; et ils exposent
"leurs mauvaises raisons", les matériaux de leur vaine justice...Ne
sont-ils pas, eux, "soumis aux illusions de leur langage",
inconscients du "seul patrimoine à sauver", agglutinés qu'ils sont
aux "temples auxquels ils tiennent" ? Ils condamnent alors
l'attitude "élitiste", voire la "mégalomanie" de celui
qui a des réponses simples à tout. D'autres que Saint-Exupéry avaient déjà
transmis de telles réponses; d'autres de ces porteurs de lumière, de
solutions aux questions humaines vitales; il fut suivi également d'autres
personnages à fonction d'"ami «-qui-prend-par-la-main, "car le
véritable enseignement n'est point de te parler mais de te conduire". Certains
les nommeraient sans nul doute aujourd'hui, avec dédain, des
"gourous", si un phénomène de mode... ou de conscience faisait
redécouvrir "en grand" les Gide, les Rimbaud, Georges Sand, etc...
qui avaient tenté de véhiculer certaines vérités de base... Et les
calomnieraient, leur lançant des traits, des flèches -lignes de tir en
contre-offensive de ceux à qui leurs lignes de conduite ou leurs lignes "inspirées"
déplaisaient! Les calomnies dont il est l'objet... Ses ennemis... notent les
éditeurs de Citadelle : ce sont d'autres lignes de force, celles de
"celui qui cherche à connaître"...Celles de Saint-Exupéry sont
celles de celui qui "sait que l'esprit seul gouverne les hommes et
qu'il les gouverne absolument" et voit
"l'arrangement". Lui, il demeure serein, éternel, rappelant
éternellement : "Je t'ai dit qu'il fallait des objets reliés ( ), pour
te faire communiquer avec des trésors de plus en plus vastes". Les
autres "s'écorchent aux ronces, luttent contre le fouet des
rafales" ; "leur liberté, c'est la liberté de n'être
point"; On n'est "plus que partage de provisions dans une
réalité haineuse", "dans la hargne de son voisin, la
jalousie de son égal, l'égalité avec la brute". Non! Crie Saint-Exupéry à longueur de page, à toutes les
lignes : "J'espère, moi, que l'on me donne le meilleur. Car, alors
seulement, vous voilà grands". Que l'on crée le meilleur! "Il
s'agit de la soumission, non de chacun à tous mais de chacun à l'œuvre et
chacun force les autres de grandir". Pas pour paraître, pas pour
gagner de l'argent, de la considération, du pouvoir; pas pour être mieux dans
sa société "fourmilière"! Non! Pour la seule plénitude, la seule
force manifestée pour "inventer un empire où tout simplement tout soit
fervent", où tout soit lié par "le nœud divin qui noue les
choses" : Au-delà du psychologique, du personnel, de la
personnalité, de l'"humain"! La perfection tout simplement!
Et "la perfection", c'est l'échange en Dieu... et c'est
l'initiation au sens véritable du mot et du concept |
LA
LAME DE LA DAGUE DE TOUTANKHAMON EST EN MḖTAL EXTRATERRESTRE |
Divers |
Arcadia |
2015 |
Toutânkhamon, le 11e pharaon de la 18e dynastie, qui régnait sur l’Egypte
il y a plus de 3000 ans, avait une dague très précieuse. Tellement
précieuse qu’elle était enterrée avec lui. Imaginez un peu, la dague a
un fourreau en or, la poignée se termine par un cristal de roche et la lame
est en fer. Du moins c’est ce qu’on croyait jusqu’à ce qu’une étude prouve
que le fer utilisé pour forger la lame est d’origine extraterrestre. En utilisant une technologie non-destructive
(la spectrométrie de fluorescence des rayons X), une équipe de
chercheurs italiens et égyptiens a confirmé que le fer de la dague qui
se trouvait contre la cuisse du jeune pharaon avait des origines météoritiques.L’équipe
qui inclut des chercheurs de l’école de Polytechniques de Milan, de
l’Université de Pise et du Musée égyptien du Caire, a publié ses résultats
dans la revue Meteoritics and Planetary
Science. L’arme est actuellement exposée au Musée du Caire. Elle
est faite d’un métal homogène non rouillé. Le fourreau est orné d’un motif
floral et d’un motif de plumes Daniela Comelli, du
département de Physique de Milan Polytechnic, a
déclaré a Discovery
News que : « Le fer météoritique est clairement indiqué par la
présence d’un haut pourcentage de nickel ». Puisqu’en effet, les
météorites ferreuses sont principalement composées de fer et de nickel avec
de faibles quantités de cobalt, de phosphore, de souffre et de carbone. Les autres artefacts en fer affichaient 4% de nickel au
mieux, alors que la dague du Pharaon en contenait près de 11%. Mais ce qui a
permis de confirmer l’origine météoritique de la lame, c’est le cobalt. Les
taux de cobalt et de nickel dans la lame
sont cohérents avec ceux trouvés dans les météorites de fer. Comelli et son équipe ont même essayé de retrouver la source
possible de la lame en fer. « Nous avons cherché toutes les
météorites répertoriées dans un périmètre de 2000 km autour de la Mer Rouge,
et nous avons fini avec 20 météorites de fer. Il n’y en a qu’une, nommée
Kharga, qui est possiblement cohérente avec la
composition de la lame. » Ce fragment de météorite a été retrouvé
en 2000 sur un plateau de Marsa Matruh,
un port maritime à plus de 250 km d’Alexandrie. L’étude montre que les
Égyptiens apportaient une grande valeur au fer météoritique pour produire
des objets précieux. Il pensaient peut-être que ces
morceaux de fer qui tombaient du ciel étaient divins.Les
plus anciens artefacts égyptiens en fer, neuf petites perles trouvées dans
une tombe sur la rive droite du Nil et datant de 3200 avant JC, étaient
aussi en fer de météorite. Et la dague n’est pas le seul élément d’origine céleste trouvé
dans le tombeau de Toutankhâmon. Son pectoral
présente une amulette en forme de scarabée qui est en verre. Ce verre n’a pas
les caractéristiques verdâtre ou jaune de la calcédoine. Il proviendrait
de verre de silice naturel que l’on ne trouve que dans les
déserts lointains et inhospitaliers proches de la Libye. Ce verre était
produit par l’impact sur le sable d’une météorite ou d’une comète. c’est
toujours impressionnant de constater que 14 siècles avant JC,
les météorites et l’espace fascinaient déjà les hommes. S'il
fallait résumer d'un mot ce qui fait le propre de la pensée française vivante
du XXe siècle, on devrait dire, à coup sûr, qu'elle a été, qu'elle est encore
une pensée du symbolique. Qu'on pense simplement à l'analyse par Claude
Lévi-Strauss de la " fonction symbolique ", ou à l'opposition
établie par Jacques Lacan entre le réel, l'imaginaire et le symbolique. Or, montre
ici de façon lumineuse Camille Tarot, c'est dans le creuset de l'Ecole
sociologique française que l'acception moderne du terme a été forgée, et
c'est grâce à la lente et subtile évolution que Marcel Mauss a fait subir aux
analyses durkheimiennes du sacré, de la religion et des représentations
collectives, qu'il en est venu à prendre toute sa portée. C'est
l'histoire passionnante de cette invention du concept de symbolique que nous
livre le présent ouvrage, dans un style à la fois limpide et époustouflant.
Au-delà d'une reconstitution sans précédent de la pensée des deux plus grands
représentants de l'Ecole, Durkheim et Mauss, elle nous offre, en prime, une
histoire de l'ethnologie, des sciences du langage et des sciences de la
religion jusqu'au premier tiers du XXe siècle. Ainsi des liens intelligibles
sont-ils à nouveau établis entre la pensée française des soixante dernières
années et ce qui l'a précédé. Et peu à peu, on se prend à rêver d'une reprise
du dialogue entre philosophes, ethnologues, psychanalystes, sociologues,
spécialistes de la littérature ou de la religion, qui trouveront tous ici
également matière à nourrir leurs réflexions. Car ce que C. Tarot nous
restitue comme s'il y était, comme si nous y étions, c'est l'exceptionnel
travail collectif de la pensée . |
Qu’est-ce que la parole perdue ? |
|
Solange Sudarskis |
2016 |
L'expression la parole perdue apparaît dans des
rituels du 3e degré, où l'on parle aussi de la perte des
secrets véritable du maître maçon. Il semble toutefois que les deux
expressions soient relativement interchangeables ; ainsi le document Prichard
de 1743 et l'instruction au 3e degré au rite écossais de la Mère
Loge Écossaise de l'Orient d'Avignon de 1774 disent-ils. Un homme meurt,
refusant de livrer un banal mot de passe pour se faire payer, connu de tous
les maîtres, et un secret dont il était détenteur, par ailleurs, disparaît.
Le secret n’est donc pas le mot de passe. Alors, est-ce un savoir que lui
seul possède ? Est-ce une partie d’un mot à prononcer avec d’autres pour
qu’il soit complet et efficient ? La parole d’Hiram serait-elle autre chose
que celle d’un seul homme ? Que peut-être cette parole pour le franc-maçon
d’aujourd’hui ? N’oublions pas que le mot Hiram porte en lui-même des
mystères et parmi ses nombreuses traductions de l’hébreu, il peut aussi être
lu comme HaReM qui désigne la chose cachée. Le savoir personnel : Quel serait ce savoir ? Au Rite York, à la mort d’Hiram, il
est dit : « Il n'y a pas de plans sur la planche à tracer pour permettre aux
ouvriers de poursuivre leur travail, et le G :. M :. H :. A :. a
disparu ». Sur la planche, le maître d’œuvre modifie le plan selon lequel la
construction du Temple devra s'effectuer. Cette planche sert en permanence de
point de repère pour l’ouvrage qui va être réalisé au fur à mesure de
l’avancée des travaux. Lorsque l’ouvrage est terminé, il doit se superposer
exactement au tracé qui est sur la planche. La conception théologique de
l'art de la construction peut se résumer en une recherche de méditation
parfaite entre la beauté pure qui n'appartient qu'à Dieu et le miroir que
doit lui offrir, par son œuvre, l’architecte afin qu'elle se révèle aux yeux
des hommes. Concrètement, ce qui fut perdu serait-ce cette capacité
architecturale de concevoir l’édifice et de terminer l’œuvre ? ·
Mais allons
plus loin. Hiram, a été envoyé par le roi de Tyr à Salomon pour ses savoirs
aussi particuliers que ceux que possédait Betsaleel, le constructeur de
l’Arche d’alliance du désert : il était habile pour les ouvrages en or, en
argent, en airain et en fer, en pierre et en bois, en étoffes teintes en
pourpre et en bleu, en étoffes de byssus et de carmin, et pour toute espèce
de sculptures et d'objets d'art qu'on lui donne à exécuter (II Chroniques, 2,
13 et 14). C’est grâce à 3 vertus que le premier temple fut construit
par Betsaleel car il est écrit en Exode 31,3 : «Je [dieu] l’ai rempli
de l’esprit d’Élohim en sagesse, en intelligence et en savoir», " ,
vertus que l’on retrouve en Hiram dans I Roi 7, 14 « rempli de
sagesse, d’intelligence et de savoir » Ces trois vertus, concepts, attributs
divins, types de forces, ou niveaux de conscience, sont les processus à
l'œuvre des structures vivantes, correspondant aux 3 Séphiroth :
Hokhmah, la sagesse ; Tébouna, alias Binah,
l’intelligence ; Daath, le savoir, la connaissance. La somme de leurs
valeurs guématrique, après réduction, est équivalente à ce qui relie les 2
colonnes Yakin et Boaz [1] qu’Hiram a fondues. La parole perdue serait-elle
l’esprit d’Elohim, cette capacité de création, comme celle du maharal de
Prague avec son Golem dont aurait été doté Hiram ? John Yarker qui, dans un article sur Le rite d’York et
l’ancienne maçonnerie en général, remarque qu’«en vérité, des ouvriers
complotèrent illégalement pour extorquer d’Hiram Abif un secret, celui de
l’animal étonnant qui avait le pouvoir de couper les pierres. Le secret
qui a été perdu par les trois Grands Maîtres est celui de l'insecte shermah
(shamir), qui a été employé pour donner un parfait polissage aux pierres.
Considérant cette remarque de Yarker, le secret opératoire du
shamir serait-il «ce qui a été perdu» ? De même, dans la
présentation du rituel Wooler, qui ressemble au texte de Yarker, on
lit dans un catéchisme du troisième degré : «Après la construction du Temple,
les ouvriers du plus haut degré, connus sous le nom de« Most «Excellent», ont
accepté les grands secrets concernant le noble In… Sh…, qui était ce qui
constituait le secret des trois Grands Maîtres et [pour] lequel HAB fut tué »
; l'utilisation d'abréviations prouvant le caractère autrefois ésotérique, ou
supposé tel, de l'information. Dans son Miscellanae Latomorum, le Dr William Wynn
Westcott propose un passage d'un vieux rituel qui parle précisément du secret
de l’insecte shamir et des trois Grands Maîtres. Voilà notre intérêt
maçonnique éveillé. Cette tradition maçonnique est ignorée de nos jours, mais
intéressons-nous à ce shamir ; essayons de trouver quelques sources à cette
incroyable histoire. Ce shamir miraculeux aurait été spécialement créée au
début du monde pour cette utilisation opératoire. Selon cette légende, quand
Salomon demanda aux rabbins comment construire le Temple sans utiliser
d'outil de fer, pour se conformer, bien sûr, à l'injonction du Deutéronome
(Exode, 20,21 ; Si toutefois tu m'ériges un autel de pierres, ne le
construis pas en pierres de taille; car, en les touchant avec le fer, tu les
as rendues profanes), ils attirèrent son attention sur le shamir par
lequel Moïse avait gravé le Nom des tribus sur le pectoral du grand prêtre. Voyons cela de plus près. Ranulf Higden (1300-1363), dans
son Polychronicon, cite la légende du ver de fendillement de pierre,
qu'il nomme thamir. Dans l’Encyclopédie juive on trouve cette légende
qui raconte que, sur la recommandation des rabbins et afin de ne pas utiliser
le fer, Salomon taillait les pierres au moyen du shamir, un animal, un ver
dont le seul contact fendait la pierre. On retrouve cette légende également
dans la littérature arabe et même dans le Coran. Dans la littérature
talmudique, il existe de nombreuses références à Shamir. Des qualités
inhabituelles lui ont été attribuées. Par exemple, il pourrait désintégrer
quoi que ce soit, même dur comme des pierres. Parmi ses possessions, Salomon
la considérait comme la plus merveilleuse. Le roi Salomon était désireux de
posséder le Shamir parce qu'il en avait entendu parler. La connaissance du
Shamir est en fait attribuée par des sources rabbiniques à Moïse. Après avoir
beaucoup cherché le Shamir de la taille d'un grain d'orge, il a été trouvé
dans un pays lointain, au fond d'un puits, rapporté à Salomon, mais
étrangement, il perdra ses capacités et est deviendra inactif plusieurs
siècles plus tard, à peu près au moment où le Temple de Salomon a été détruit
par Nabuchodonosor. Étonnant et curieux Shamir ? Qu’est-ce donc ? Selon
les auteurs médiévaux, Rachi, Maimonide et d'autres, Shamir était une
créature vivante, un ver ; soutenant que Shamir ne pouvait pas
être un minéral parce qu'il était actif. Ce ver magique était doté du pouvoir
de modifier la pierre, le fer et le diamant, par son simple regard. Par
ailleurs, les sources rabbiniques ont transmis la description de la gravure
des noms des douze tribus sur les douze pierres précieuses de la cuirasse du
grand-prêtre (le pectoral) ; Moïse le fit non pas par sculpture, mais en
écrivant avec un certain fluide et en les «montrant» à Shamir, ou en
les exposant à son action. De l'avis des auteurs modernes, l'expression
«montré à Shamir » indique clairement que c'était le regard d'un être
vivant qui a effectué la division de bois et de pierres. On admet cependant
que dans les sources talmudiques et midrashiques, on ne dit jamais
explicitement que le Shamir était une créature vivante. 3
Alors Shamir/ schamir/ samur, comme on en trouve l’expression, un ver de la
taille d’un grain, ou autre chose, une pierre selon les différentes sources
littéraires ? Une vieille source, La Légende de Soliman et testament
de Salomon [2], ouvrage écrit en grec, probablement au début
du troisième siècle de l'ère actuelle, se réfère à Shamir comme
une «pierre verte», page 10 note 31 : le shamir serait une pierre de cristal
vert de grande puissance. Le nom dérive probablement de samir/ épine ou
tranchant. Un seul shamir est reconnu avoir existé. Il est sculpté en forme
de coléoptère, scarabée de l’espèce sacer ateuchus. C’est la raison
pour laquelle on a confondu le shamir avec un insecte. Mais comment une pierre verdâtre
aurait-t-elle pu couper le plus dur des diamants avec son seul regard ?
Reprenons ce que raconte Louis Guinzberg, en 1909, dans Les légendes des
juifs, qui, inspiré par l’exégèse rabbinique, rapporte l’histoire de
manière très fantastique : le shamir fut créé au crépuscule du sixième jour
avec d’autres choses extraordinaires. Il n’était pas plus grand qu’un grain
d’orge et possédait le pouvoir remarquable de tailler les diamants les plus
durs. C’est pour cette raison qu’il fut utilisé pour les pierres du pectoral
porté par le grand prêtre. D’abord on traça à l’encre les noms des douze
tribus sur les pierres qui devaient être serties dans le pectoral ensuite le
shamir fut conduit sur les lignes tracées et celles-ci furent ainsi gravées.
Circonstance miraculeuse, le tracé ne porta aucune particule de pierre. On
avait également utilisé le shamir pour tailler les pierres dont fut construit
le Temple, car la loi interdisait d’utiliser des ustensiles de fer pour tout
ouvrage destiné au Temple. Pour le conserver, il ne faut placer le shamir
dans aucun réceptacle de fer, ni d’aucun métal, il le ferait éclater. On le
conserve enveloppé dans une couverture de laine qui à son est tour est placée
dans une corbeille de plomb remplie de son d’orge. Le shamir fut gardé au
Paradis jusqu’au jour où Salomon eut besoin de lui. Il envoya l’aigle pour y
chercher le ver. Lors de la destruction du Temple, le shamir disparut [3]. La manière dont Shamir était gardé en sûreté peut
nous donner un indice: «Le Shamir ne peut être mis dans un vase de fer
pour la garde, ni dans aucun vaisseau métallique: il éclaterait un tel
récipient. Il est gardé enveloppé dans de la laine à l'intérieur d'une boîte
de plomb rempli de son d'orge. Cette phrase est tirée du chapitre 48b du
Talmud de Babylone et contient un indice important ; car, avec la
connaissance actuelle nous pouvons facilement deviner qui ou plutôt ce
qu’était Shamir : c'était une substance radioactive ; les sels de radium, par
exemple, agissant sur certaines autres substances chimiques, peuvent émettre
une luminescence de couleur jaune-vert. Cela expliquerait comment le pectoral
du grand-prêtre avait été gravé : les lettres étaient écrites à l'encre, et
les pierres étaient exposées l'une après l'autre au «regard» ou au
rayonnement du Shamir. Cette encre devait contenir du plomb en poudre
ou des oxydes de plomb. Les parties des pierres qui n'étaient pas protégées
par le plomb se désintégrèrent sans laisser de particules de poussière qui,
selon ce Talmud, paraissaient particulièrement merveilleuses. Les parties
protégées par de l'encre de plomb se dressaient en relief sur la surface des
pierres précieuses [4]. La possession la plus précieuse de Salomon, son Shamir,
n'a pas survécu avec le temps, il est devenu inactif. La version habituelle
de l'histoire, « le Shamir disparu », ne correspond pas à la
traduction exacte texte hébreu. Le mot batel utilisé pour décrire la
fin, ou la disparition, de Shamir n'a qu'une seule signification
: "Pour devenir inactif.". Dans les quatre cents ans qui ont
passé de la construction du premier Temple à sa destruction par
Nabuchodonosor en -587, une substance radioactive aurait pu devenir inactive [5]. Le secret
d’Hiram serait-il celui de l’utilisation d’une sorte de laser radioactif [6] ? Et si la « parole » était un ensemble d’éléments répartis
entre plusieurs détenteurs dont la méconnaissance d’un seul entraînerait
l’inefficacité du tout ? Un morceau de code en somme, un morceau de symbole !
Dans la légende, de fait, trois personnes forment un triangle : Salomon, le
roi de Tyr et Hiram, les trois grands maîtres, chacun assigné à un rôle
particulier et indispensable dans la construction du Temple. La légende dit
que le Roi Salomon, Hiram Abiff, Roi de Tyr (1 Rois: 7:13), et Hiram
Abi de la tribu de Dan (2 Chr.: 2:13) se sont réunis pour concevoir les
plans de la construction du Temple, Salomon conçut, Hiram de Tyr fournit les
moyens et Hiram réalisa l’œuvre. Nous apprenons que le grand savoir devait
être gardé par ces trois personnes jusqu'au parachèvement du Temple. La
parole leur aurait-elle été confiée en trois parties. Chaque membre du
ternaire serait détenteur du mot sacré ou d’une fraction de celui-ci. Il
fallait le concours des « trois premiers Grands-Maîtres », de sorte que
l’absence ou la disparition d’un seul d’entre eux rendait cette communication
impossible, et cela aussi nécessairement qu’il faut trois côtés pour former
un triangle. Cela veut dire que chaque membre du triangle constitue la pointe
d’une figure doté d’un centre commun. Ce centre, c’est le point de
concordance des trois sensibilités magique, spirituelle et rationnelle qu’ils
incarnent. Ce centre est donc l’essence de l’homme et de la nature
c’est-à-dire l’essence de la vie qui se traduit concrètement en force de vie
ou élan vital. Comment se fait-il que, sachant que la parole ne pouvait
être que par la réunion du 3 (le roi Salomon, le roi de Tyr et Hiram),
comment se fait-il qu'aucun d'entre eux n'ait pensé à transmettre sa propre
connaissance à un disciple pour que la chaîne ne se brise pas en cas de
disparition? Était-ce se croire immortel ? Les exégètes des rituels
assimilent la prononciation du Tétragramme à la « parole perdue ».
Elle devait être trisyllabique. La syllabe est l’élément réellement
indécomposable de la parole prononcée, même si elle s’écrit naturellement en
quatre lettres. En effet, quatre (4) se rapporte ici à l’aspect « substantiel
» de la parole et 3 à son aspect « essentiel ». Il est d’ailleurs à remarquer
que le mot substitué lui-même, dans sa prononciation rituelle, sous ses
différentes formes, est toujours composé de trois syllabes qui sont énoncées
séparément. Considérant que chez les Hébreux, le grand prêtre, le Cohen
Gadol, était seul détenteur de la prononciation recta dictio et
totale du mot sacré qu'il vocalisait une fois par an dans le saint des
saints, cela pourrait vouloir dire que la parole ne fut pas perdue et
que si Salomon la substitua, c'est qu'il pensait que son Maître d'œuvre avait
cédé à la pression de ses agresseurs en la dévoilant : il fallut donc changer
cette parole. Dans ce même registre, on remarquera que lors de la
destruction du Temple de Jérusalem et de la dispersion du peuple juif, la
véritable prononciation du Nom tétra grammatique fut perdue ; il y eut bien
un nom substitué, celui d’Adonaï, mais il ne fut jamais regardé comme
l’équivalent réel de celui qu’on ne savait plus prononcer. En effet, la
transmission régulière de la prononciation exacte du principal nom divin,
désigné comme ha-Shem ou le Nom par excellence, était essentiellement
liée à la continuation du sacerdoce dont les fonctions ne pouvaient s’exercer
que dans le seul Temple de Jérusalem ; serait-il le centre spirituel de la
tradition qui fut perdu ? Les mystères des sociétés initiatiques de
l'Antiquité perpétuaient les premières traditions du genre humain et les
nouveaux acquits des corps savants pour élever, au-dessus de leurs
semblables, des initiés jugés aptes à en faire un usage utile pour tous. Cet
enseignement leur était donné de bouche à oreilles après avoir pris
l'engagement, par un serment menaçant, de ne le transmettre à d'autres
initiés que sous les mêmes formes et conditions. Il est raconté qu'ils
étaient possesseurs de secrets scientifiques redoutables et bienfaisants,
dont leur haute morale imposait le respect, mais susceptibles, étant
détournés de leur action bénéfique, d'être transformés dans un but
malfaisant. Les initiations furent interrompues ; des initiés s'éteignirent,
emportant dans la mort les secrets qui leur avaient été confiés. Les secrets
des rites initiatiques pour l'intromission des pharaons, véritables mystères
de la lignée royale d’Égypte, furent définitivement perdus à la mort du roi
Sekenenrê Taâ qui mourut sans les avoir dévoilés à son ennemi qui voulait les
lui arracher. Dans certains cas, au lieu de la perte d’une langue, il
est parlé seulement de celle d’un mot, tel qu’un nom divin par exemple, caractérisant
une certaine tradition et la représentant en quelque sorte synthétiquement ;
et la substitution d’un nouveau nom remplaçant celui-là marquera alors le
passage d’une tradition à une autre. Quelquefois aussi, il est fait
mention de « pertes » partielles s’étant produites, à certaines époques
critiques, dans le cours de l’existence d’une même forme traditionnelle :
lorsqu’elles furent réparées par la substitution de quelque équivalent, elles
signifient qu’une réadaptation de la tradition considérée fut alors
nécessitée par les circonstances ; dans le cas contraire, elles indiquent un
amoindrissement plus ou moins grave de cette tradition auquel il ne peut être
remédié ultérieurement[7]. Que peut-être la parole perdue pour un F\M\ d’aujourd’hui
? Les remarques que nous venons de
faire montrent que la parole perdue serait soit un savoir, soit une
prononciation, soit une connaissance spirituelle ou magique soit encore la
trace du passage d’une tradition à une autre. La parole perdue du F\M\ me
paraît un peu différente. Nous ne pouvons faire l'erreur des mauvais compagnons
qui croyaient que le secret du maître maçon relevait de la communication d'un
savoir ; notre recherche est bien différente puisqu'elle se place sur le plan
de la Connaissance, celui de l'être et du spirituel, de l'immanence et de la
transcendance. Dans l’exotérisme judaïque, le mot qui est substitué au
Tétragramme qu’on ne sait plus prononcer est un autre nom divin, Adonaï,
qui est formé également de quatre lettres, mais qui est considéré comme moins
essentiel ; il y a là quelque chose qui implique qu’on se résigne à une perte
jugée irréparable, et qu’on cherche seulement à y remédier dans la mesure où
les conditions présentes le permettent encore. Dans l’initiation maçonnique,
au contraire, le « mot substitué » est une question qui ouvre la possibilité
de retrouver la « parole perdue », donc de restaurer l’état antérieur à cette
perte. La parole perdue met en relief la nécessité d’une nouvelle perception
et d’un nouveau langage relatif à la notion d’essence et de présence au-delà
de la forme. Elle n’est pas à comprendre comme uniquement une perte dans la
transmission, mais comme le commencement d’un apprentissage d’autres éléments
de langages. Il nous reste à nous interroger sur comment trouver cette
parole ou comment lui en substituer
une autre de même puissance. Notes
de lecture : [1] Si, comme en guématrie simple on ne donne pas une valeur
particulière aux lettres finales : Yakin s’écrit «יָכִין» yod, kaph, yod, noun et a une
valeur de 10+20+10+50 = 90 ; Bo’az s’écrit « בֹּעַז» beth, eïn,
zaïn et a une valeur de 2+70+7 = 79. Entre les deux il y a une différence, une présence de 11.
Hakhmah, « חָכְמָה»,
la sagesse , (heith, kaph, mem, hé) soit 8+20+40+5 =
73 Tébouna, alias Binah, «תְבוּנָה
»l’intelligence (tav, beith, vav, noun, hé) soit
400+2+6+50+5 = 463 Daath, « דַעַת
» le savoir, la connaissance (dalethh, eïn, tav) soit 4+70+400 = 474 L’ensemble des 3 vertus : 73+463+474 = 1010 soit en
réduction 11 [2] D’après les chroniques de Tabari Me d Ibn Djarir, Sabine
Baring-Gould, Ahimaaz bin Tsadok,
Louis Ginzberg, John D. Seymour. https://books.google.fr/books?id=-oEaEmuYFPoC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false [3] À rapprocher de l’Ourim et le Thoummim
qui sont généralement considérés comme des objets ayant trait à l'art de la
divination. En hébreu, le mot ourim signifie
lumières, et thoummim, perfections, parfois
traduit par vérité. Les érudits juifs les décrivent comme un instrument qui
servait à donner la révélation et à déclarer la vérité. Ils disparurent avec
la destruction du 1er Temple, le shamir, quant
lui, disparut avec la destruction du second Temple. Ils sont tous en rapport
avec le pectoral porté par le Grand prêtre d'Israël. [4] La plupart des gemmes, tels que le diamant, le saphir,
l’émeraude ou la topaze, sont décolorés par la radioactivité. D’autres
pierres précieuses, comme l’opale, sont constituées de cristaux de silice
hydratée. Le rayonnement alpha les désintègre en rompant la liaison avec
l’eau ; celle-ci se volatilise sans laisser de résidu. [5] Le radium perd environ un pour cent de sa radioactivité
tous les 25 ans [6] Pour compléter cet aspect :
http://www.lamed.fr/index.php?id=1&art=1424&mode=print [7] La mort d’Hiram et la Parole perdue de René Guénon |
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